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 Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU )

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MessageSujet: Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU )   Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU ) EmptyDim 12 Mar - 6:18

... extraordinaires. J'en ai déjà parlé. Où et quand je ne sais plus. Je parle de Marcel Moreau. Magnifique. Un verbe haut et rageur qui devrait plaire à Vilain, peut-être aussi à notre Veilleur.
Il a beaucoup écrit, et possède une biographie passionnante que je laisse à Google le soin de vous divulguer.
Il a écrit, entre autre, La jeune fille et son fou que j'ai commencé à ré-écrire jadis, du point de vue de la jeune fille.

Extrait.

La jeune fille et son fou.

Seconde voix.


Je suis cette jeune fille, tout juste bout de femme qui fait effectivement fi de tes ans. Ecoute mon Amour, écoute mon amour te retenir de te ternir.

N’oublie pas, mon Amour, ce jour où, mon plaisir dans le tien, tu échangeais enfin tes mots et tes maux graves contre mes mots rieurs. – Lueur – On l’entendit cette onomatopée, celle qui ne traduisait rien de plus que notre excitation réciproque , qui ne voulait rien dire sauf l’essentiel : nos corps, après nos esprits, quelque part, étaient en résonance. Finies l’absence et la distance, ils rendaient le même son, amoureusement le même.

Je suis belle, je le sais. Dans tes yeux, à ton bras je suis radieuse, chaude comme la braise. Désirable et désirée, tu écrivais comme j’aime, pas vraiment si noir, pas tellement terminal. Tu signais juste la mort d’une partie de ta vie et je suis venue, imprévue, presque incongrue. J’ai réuni nos visages, nos paroles et nos souffles. Je t’ai dit « je t’aime », répétant après toi, mon Amour, mon âme ourse, en le rafraîchissant , ton vieil aveu de fou.

Parfois, de mes yeux qui t’y mènent, de ma voix qui t’y guide, tu passes en mon enfance blessée des moments sans lumière. Je ne fus pas heureuse, tu l’as deviné, à l’âge des premiers bals et des rêves de royauté. Oubliée, perdue, fuite, vaincue ma féminité. Je sais que mes puériles ténèbres ont quelques chose à apprendre à ta science de la nuit. Aujourd’hui, comme si la joie était enfin possible, oh oui, je fais de ton corps lourd mon grand jouet. Je t’objetise, te magnétise, te manipule jusqu’à ce que, pour mon plus grand bonheur, comme une offrande divine que le ciel me ferait, tu éjacules. J’aime tant ton abandon mon fou, j’aime ton extase silencieuse. Ton silence est mon évidence tout comme mon insolence est la tienne.

Je me souviens cette gare, ce quai, ta rencontre, ma révélation. Je me souviens de ce jour où mon bras à ton bras, nous marchions dans les rues de Paris comme on monte au Désir. Je te suivais d’un même pas, d’un même serment, d’un même tremblement de la chair, j’attendais, je mourrais d’attendre l’instant ou nous rebrousserions chemin, l’instant où nous allions nous aimer, vite, sans trop de détours, comme en adolescence. J’étais frémissante, ardente.

Peu à peu, peau à peau, nous faisons des projets de jumelante ferveur. Sans remords aucun, presque avec arrogance, nous mêlons nos âge dans la coupe lubrique, ludique aussi, puis dans le romantique. Tu dis ne plus avoir vaste avenir, mon Amour. Je suis immense promesse… A nous dire l’amour, en vue de nous le faire comme on passe à l’acte quand le verbe ne suffit plus, sais-tu, le temps s’immobilise entre nos corps joints. Et même, s’y englue…

Je suis ton accent d’éternité. Ma verte déraison répandue sur ton ventre et la tienne, automnale, louant du brusque été la fleur déraisonnable.

Je ne maudis pas ces autres femmes que tu as, avant moi, tant aimées. Je sens chez toi, en toi, qui émane le respect que tu leur portes, leur demandant, presque implorant, de permettre à l’homme que tu es devenu, toi que tes passions plus d’une fois abattirent, foudroyé, à leurs pieds, de serrer contre toi celle par qui la passion est une fête : Moi, fendant l’orage en deux, une moitié pour en rire, une moitié pour en jouir. Je le vois, sais-tu, qu’il est des nuits où mon espièglerie te met en dur désir de moi plus étonnamment que ne le fait la luxure. J’aime quand tu me soulèves, légère, libre, belle, épanouie, ravie, quand tu me reposes brûlante… C’est assez pour que de mon corps tu tires un chant de gloire. J’aime qu’aux images corpulentes, tu substitues, ravi toi aussi, mes blasons de fillette, leurs jeux inattendus, leurs façons entrouvertes, à peine dévoilées déjà obscènes, sans aucun voile de timidité, révélant mon fondement détrempé.

Entre tes livres et mes lèvres, il y a comme une histoire qui ne demande qu’à naître, une impudeur qui ne demande qu’à croître. J’en sais long déjà, sur ce que tu tais. Et ce que tu tais, mon Amour, ce vers quoi tu tends, je le sais bien, c’est le mystère sans mot qui donne à nos élans le visage du désordre et à notre amour celui de la beauté.

Tout ce qui bouge en moi, en toi, en nous, nous prépare à un art dont nous ignorons encore tout, un art qu’il nous reste encore à découvrir, à sculpter. Nous nous passons si bien des mots qui deviennent alors des musiques, des tableaux , aquarelles en bouche, à moins que ce ne soient les germes d’une poésie sauvage, non savante, béate, duveteuse, cramoisie, dont la langue puiserait dans nos entrailles ses rimes incongrues. Nous nous disons des choses que seule l’élite des extravagants pourrait entendre si elle nous écoutait. Elle ne nous écoute pas. Même elle, nous la tenons à distance de nos ouvrages obscures et grandissants. Quand nous sommes deux, qu’advient-il donc de nos frottements l’un contre l’autre ? Un désir certes, mais encore ? Tu l’ignores, mon Amour… Et pourtant… Pourtant c’est comme un livre que tu vois s’écrire, des formes que tu vois s’esquisser, des petites merveilles de monstruosité et qui se mettent à vibrer dès qu’on les touche, ou à chanter dès qu’on les sollicite, ce que nous faisons en plus de l’amour que nous faisons, ou que nous allons faire, cette façon que nous avons, du fond de la chair et du bout des doigts, entre nos regards, de créer ensemble œuvre étrange, baroque, branlante, polymorphe tour à tour trouée, raccommodée, s’écroulant avec nous sur notre couche, se redressant immense, et ivre, l’amour, en somme, comme plaisir et comme inspiration.
Je suis ce fruit incisé dont tu cherches le noyau, attendrissable et lisse, ce fort secret des sens, passé la chair sucrée. Il y a là, tu le sens, tout ce qui explique, même énigmatiquement, le fait que moi, féminine, toi, masculin, ce sont nos vertiges frères et nos sœurs hérésies qui, par signe quasi incestueuses, nous rapprochent, de jours en nuits.
Tu crois en moi, furtive fiancée, moins furtive que d’autres, plus fiancée que toutes. Tu crois au feu grégeois qui couve en mes pensées, et crois aux farfadets qui lui soufflent dessus. Tu crois en mes pensées cruelles ainsi qu’en mes époustouflantes. Tu crois au génie rosse et rose qui me dévore l’esprit, pendant mes insomnies et pousse mon entre-jambe à te chevaucher ou te re-chevaucher. Tu crois aux cris que je retiens, et aux soupirs que je leur prend pour en faire des murmures, des confidences osées ayant haleine de chatte. Tu crois en ma douceur romane, en mes élans gothiques, en ces drôles de spirales qui montent sans rigueur de mon enfantillage à la maturité. Tu crois en mes envies de savoir ce qu’il est défendu de savoir, en mes envies de faire ce qu’il est inconvenant de faire. En mon envie d’être, enfin, moi-même, enfin désencombrée, enfin libre, disant : « Je t’aime » au fou et « je te hais » au sage. Tu crois en mon tout petit ventre petitement renflé, où tu poses parfois avec délicatesse ta tête à l’écoute de ma toute grande avidité, grandement affamée. Tu crois en mes sens, et jusqu’en mes non-sens, et contresens fameux, tu crois. Tu crois en ces pages importantes que je remplis d’amour et de ratures d’un pleur et que tu tournes une à une, avec lenteur, avec piété, avec la suave salivation des illuminés, tu crois, oui, tu crois que quand je trempe dans ta bouche ton doux pistil de l’ombre, de mon corps j’écris avec des mots étranges mon premier livre vrai. Tu crois, oui, tu crois que plus tu me caresseras, infatigable, plus ce sera moi l’artiste et ce sera toi le copiste. Oui, tu crois, tu crois en moi.

Hier tu as vu ma robe tomber, mais comme tombe un tabou. Affaissée à mes pieds, s’y roulant en boule, inutile, dérisoire, surannée. Tu m’as vue piétiner le tabou. Tu m’as vue me rhabiller et c’était alors comme une autre façon de me déshabiller, d’être plus nue que nue. J’étais la plus belle tombeuse de tabous. Car rhabillée, je portais, que dis-je, j’arborais, audacieuse la trace des audaces révélées, de ma neuve luxure, des distillats d’un corps s’étant saigné d’amour.

Je te désire vieux fou, moi, gracille batailleuse, je viens sur ton corps m’acharner de mes petits poings de môme, je vais, triomphalement, m’asseoir sur ton ventre, y faire sauter mes fesses. Je vais, je viens jusqu’à ce que ton étreinte tout à coup m’amolisse et que d’un baiser tu m’étendes et me vainques délicieusement. Je vais, mutine au piano, rejouer sur ton clavier d’en bas mes gammes très coquines, mes arpèges grossissants, mes improvisions. Je vais, moi, divine et exquise sauvageonne, sur ton cuir d’une autre époque, m’étendre… liquéfiée, le parfumer de mon odeur, l’entêter de l’odeur d’avoir déjà joui. Je vais, moi, lasse enfant douée, zébrer ton sommeil noir et le repeindre orange. Je vais, ingénue dormante, me blottir contre toi, reprendre en tes bras mon rêve de te soumettre mon portrait en dompteuse ou en ensorceleuse, ou d’une autre manière, mon songe adorable. Je vais, de ma respiration ou de mon tressaillement, charmer ta tendreté, la re-durcir d’un flou, ou de ma main qui erre, puis de mes doigts qui trouvent. Je vais régner sur le dernier empire que tu puisses fonder et que tu m’abandonnes.

Quand tout en nous ne fera plus que l’amour, nos sexes, nos cœurs , nos idées, nos soifs, nos faims, nos frissons, nos vacillations et jusqu’à nos chutes, alors, alors seulement, le monde que nous n’avons pas aimé pourra se faire aimer de nous. Quand tout en nous ne dira que l’amour, nos sciences enfouies et serpentantes, nos silences empoissés quoique forts éloquents, nos héritages de soufre et d’immodération, nos abondances bariolées de nuit, alors, alors seulement, la vie que nous avons aimée, il ne nous importera plus qu’elle nous aime ou non.

Nous, couple contrasté, disparate, ni cocasse, ni sérieux, indéfini, imparfait à souhait, défiant les équilibres et toute concurrence des gens qui nous dévisagent. Toi, comme si tu étais mon père, moi m’en fichant pour de bon, d’une royale arrogance. Toi que l’on imagine peintre et moi que l’on croit ton modèle, les gens nous indiffèrent. Toi, moi, nous tour à tour scrutés imbécilement, ou, miracle, intelligemment, toi, moi, nous, enviés ou suspectés, jugés en toute hâte, condamnés ou absous, nous n’aimons des braves gens que ceux qui savent que nous nous aimons.

Tu aimes ma bouche qui au moins chez moi n’est point triste : Je parle comme je désire. Chaque mot je te le dédis, je te le mouille, sur ma langue le fais fondre. Tu la trouve bien sensuelle ma voix, et mes dires sont tes gourmandises. Ils viennent de la chair chaude, ils sont ses sonorités sourdes, et ses bémols de molle, ses assonances de corps gagné à des plaisirs de liquoreuse lignée. Mes mots, tu mets tes yeux dedans et tes oreilles devant. Ta présence justifie mon existence.

Parfois tu me fais taire mais je sais que tu écoutes encore et que ma parole coule jusqu’en tes veines saoules. Quand tu m’embrasses, nos émois qui clapotent chantent plus vrai que la mer, ils remontent de l’abysse des chants concupiscents. Tu t’en vas en ma bouche comme tu glisses en mes reins, pour mon bruit magnifique, mes rumeurs de noyée. Je reste alors chavirée, entièrement subjuguée.

Je sanglotais, tu en étais malheureux. Tu as lu dans mes yeux vastes un effrayant récit . En une journée, j’avais vu le pire : des images de ruptures, ton amour de moi mort, mon repelotonnement. Tout en moi qui crie : Aime-moi ! Jusque dans mon corps qui se cabre.
Nos vies sont inégales. Ce qui ne nous ment pas, ce sont ces heures de grâce où chacun de nous est prêt pour reconnaître en l’autre l’amour immémorial. Ces heures-là sont les même pour nous deux. A la place où elles nous mettent, il n’y a de place que pour nous, nous agrégeant en elles, tels des amants féaux, enchaînés l’un à l’autre par un bonheur foutral. J’aime tant quand tu fermes les yeux de me voir aussi belle qu’au premier jour. Tu me dis : « essuie tes larmes. » Mais j’ai tellement le ventre noué de cette peur insensée de te perdre… Te souviens-tu quand je craignais encore de te rencontrer par peur d’être déçue ou encore par peur de te décevoir , tu m’écrivais : « Prenons ce risque, et si nous ne devions pas nous plaire, si ça n’était qu’un rêve, alors cela aura été un beau rêve ». Ce rêve d’hier est aujourd’hui mon quotidien, mon bonheur.

Je suis ton doux cœur et tu aimes ma paresse de chatte alanguie qui t’invite aux caresses. En d’autres temps, mon prélassement eût été celui des gâtées du château, demoiselles nues et bâillantes, guettant sans impatience la venue de l’habilleuse de leur corps. Corps. J’ai celui des pâles voluptueuses du matin, qui se lissent la peau, et se touchent probablement, en l’endroit du désir en l’absence de l’être aimé. Pourtant, tu le sais, aucun attouchements que je puisse me faire ne sais plus générer chez moi de plaisir avec la même intensité que celui que tu me procures.


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MessageSujet: Re: Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU )   Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU ) EmptyDim 12 Mar - 6:24

Tu sais comme j’aime m’attarder à humer les odeurs de literie, nos chères fragrances nocturnes comme j’aime en ton absence porter tes vêtements sales, ceux qui portent ton odeur, comme on arbore fièrement le drapeau de sa patrie.
Je soupçonne ma paresse de te charmer au point que tu la baises. Elle a la torpeur d’une infante languie, la lenteur de la même, engourdie. Tu aimes ma paresse, mon indolence voire mon insolence moite, mes volutes équivoques, les feintes de restrictions de ma chair alléchée. C’est alors que te viens l’envie, érotique s’il en est, de m’exempter de toutes tâches autres que celles qui réjouissent mes sens. Je te suis tellement reconnaissante d’avoir une telle confiance en moi, une telle confiance dans mes capacités à être initiée femme, sensuelle. Tu as su éveiller chacun à son tour, délicatement lever le voile sur chacun de mes sens : vue, ouïe, goût, odorat, toucher. Mon initiation vaudrait d’ailleurs à elle seule un livre à part entière tant elle s’est révélée délicatement au fil du temps. Mon Amour, ma reconnaissance t’est et te sera infinie quelque soit notre avenir. Tu es inscrit dans mon être comme le sont dans les ouvrages les noms des hommes célèbres qui ont façonné le monde.

Mon Amour, ressentir ton envie de me prendre telle quelle, telle que tu me découvre oisive et lascive à la fois, toujours accessible, gémissante et superbe m’excite au plus haut degré et ton envie de me servir m’émeut.

Je crois en ton amour de moi. Tu m’aimes, oui, compliquée puis simplifiée par mon humeur parfois acide. Tu m’aimes tout à coup hargneuse, teigneuse, démesurées, excessive, ravalant les nuances au rang d’imbécillité. Tu aimes ma violence d’ex-communiante blanche, touchée par quelque grâce sauvage, païenne, que l’amour soudain amadoue, lustre. Quand je haïs ce que je pense devoir haïr, je n’en n’aime que mieux ce que je dis savoir aimer. L’amour que je t’offre me garde belle dans la haine que je t’épargne. Et même… si je ne te l’épargnais pas, cela n’altérerait en rien la beauté que je te montre, victorieuse que je suis de t’avoir séduit.

Tu aimes mes manques : ils sont désirs. Tu aimes mes lapsus : ils sont capiteux. Tu aimes mes erreurs, ce sont des nuages. Tu aimes mes refus : ce sont tes futures conquêtes. Tu aimes mon imperfection volant aux éclats. Tu ramasses ces éclats, les rapproches, les rassembles, architecte de ma vie, sans rechercher aucunement à ce qu’ils retrouvent dans l’ensemble, leur place initiale. Tu traces les plans de mes nouveaux aménagements. Je ne suis pas ton puzzle, je suis ton désordre. La perfection du désordre, c’est moi.

, mon crève verge, mon débit d’imbibé de tes babines bues,

Je lis :
« Ma bien-aimée,
Parfois, ouvrant une porte, je me retrouve captif. J’ai en moi, des lieux désolés. C’est là que je me souviens, plus que je n’agis. Que je me prostre, plus que je ne lutte. De loin le chantier, et de près les décombres.
Je en sais si c’est ma passion des femmes ou celle de l’écriture la cause de cette brèche par où ma vie s’échappe. Est-ce vraiment une brèche ? On dirait une fissure. Une sorte de lézarde qui n’aurait de sensoriel que l’impression qu’elle me laisse de s’agrandir sous la poussée du doute. Ce doute est pluvieux, et comme tel il s’infiltre. C’est ainsi je crois, qu’un homme se décompose, et qu’avec un peu de clairvoyance il s’aperçoit que son histoire excessive se fait poussive. En somme, et dans le moins pire des cas, une pauvre civilisation des usures. Où sont ces noirs espaces du dedans que j’explorai à l’époque où le corps verbal, et l’autre, le génital, dressaient sur mes égouts des pyramides ivres ? Dont celle du savoir, surtout l’intempestif ? J’ai tiré les rideaux. J’ai baissé la lumière. J’écris un texte gris. Il est vrai que tu es absnte. C’est assez pour que, resté seul avec mes mots, je voie les plus résiduels d’entre eux reprendre leur œuvre là où ta présence l’avait interrompue. Je suis triste aujourd’hui, car je me demande où j’en suis de l’amour, et si celui que tu me donnes n’est pas trop beau pour ce dont je suis capable. Et pourtant, je t’aime, je te le jure, ma main sur ta peau, et mes yeux dans tes cieux.
Quand tu me poses mille questions sur mes amantes, que tu te représentes en prêtresses forcenées des choses du bas-ventre, je sens ton inquiétude, j’ai envie d’en sourire. Que te répondre, sinon que toi tu innoves ?
Quand tu reviendras, je n’aurai plus peur de Eros-Erosion. Eros-Erosion, ce n’est pas la rencontre insolite de deux mots dans le petit monde des allitérations. C’est bien plus que cela. C’est comme une sombre maladie, sournoisement chronique. Elle atteint l’homme qui, ayant beaucoup aimé, se soupçonne d’être fatigué d’aimer. Eros-Erosion, c’est peut être encore se rassurer de séduire, c’est déjà ne plus s’agiter à conquérir. Dans Eros-Erosion, la passion se montre, c’est inévitable ; elle se sait passagère, et c’est désespérant. Dans Eros Erosion , la femme peut bien être tour à tour louée, admirée, caressée, baisée, adorée et donc sacralisée, il arrive un moment où elle meurt en moi de l’avoir été.
Mon cœur a eut la foi qu’il fallait pour la rendre éternelle, il n’a pas la laïcité qu’il faudrait pour la garder vivante. La laïcité, en l’occurrence, ce n’est sans doute que ce que l’amour conciliatoire exige de courage au quotidien. Je n’ai pas de courage au quotidien, je n’en ai que pour l’extraordinaire, si l’on peut appeler courage le défi qui consiste à aimer inconsidérément, et si l’on peut appeler extraordinaire l’amour que l’on sait destructeur ou destructible. J’ai toujours eu besoin de merveilleux, mon amour, et les émois immodérés sont mon « merveilleux à moi ». Ce besoin là est épuisant, et cet épuisement, je lui ai trouvé un nom : Eros-Erosion. Et pourtant, je crois que ce je ne sais quoi de fixe qui manque à mes errances, ou de sage à mes dévergondements, il serait malheureux qu’une femme, fût-elle aimée, me le fournisse. Avec toi, je n’ai plus peur de Eros-Erosion. Quand nous nous sommes unis pour la première fois, j’ai compris combien tu saurais me maintenir dans l’aventure de nous séduire plus que de nous installer dans l’habitude de nous plaire.
Ne trouves-tu pas étrange que je t’écrive tout cela qui mêle le doue insinuant l’abrupte certitude et me rend si fragile à moi-même ? »

Je lis et relis ta lettre et je comprend l’aveu que, peut-être, tu ne fis à nulle autre : je te donne du bonheur. J’innove, disais-tu . Oui, je te donne du bonheur à un âge où tu ne sais comment faire pour qu’il persévère et ne soit ni béat, ni illusoire. Ce bonheur, j’aime à croire qu’il t’arrive comme une émotion inconnue, portant mon nom, et dont tu te verrais contraint d’apprendre le mode d’emploi. Parfois, je te sens d’une insigne maladresse devant et dedans ce bien-être qui te vient de ton amour de moi autant que de l’amour que je te porte. Abandonne-toi à l’événement, car c’en est un, sans prendre le risque d’en corrompre le délice par le désir de savoir pourquoi il est là, et pourquoi il y reste. Fais cet effort, mon tendre Amour, d’accepter d’un cœur léger, insouciant, cet état. Cesses de t’interroger sur le don ou la force que tu possèdes de le porter jusqu’au bout, sans défaillir, c’est-à-dire sans te sentir appelé à retomber, tôt ou tard dans la vie convulsive. Quand nous sommes près l’un de l’autre, et qu’à loisir nous nous offrons l’un à l’autre, notre bonheur ne laisse place à aucun débat. Nous le goûtons pleinement, tant il est évident, tant il nous paraît inonder d’une grâce qui aurait été, de toute éternité, la nôtre, et dont nous nous étonnons encore pourtant de jouir. Mais sais-tu ? Quand tu t’en vas, moi aussi je m’inquiète. Mon Amour, nous serions-nous découvert mutuellement une façon d’être passionné mystérieusement exemptée des malédictions habituelles en l’espèce : tourments, souffrances, ruptures, déchirures ?
Ta passion pour moi est vraie. Ma passion pour toi l’est aussi. Notre passion est invincible. Et elle est enveloppante, caressante, elle a cette secrète violence que semblent parfois transmettre à ceux qui s’aiment les Dieux épiphanes. C’est donc une passion. Non une hypothèse de passion. C’est donc un feu, non la préparation ou l’envisagement d’un feu. Je t’aime comme tu m’aimes avec une passion, un feu, qui ne respirent pas le soufre, et ne complotent contre la vie. Est-ce là le bonheur ? En tout cas, c’est de la Beauté, de cette beauté rare qui ne veut pas mourir. En tout cas, c’est de l’amour, de cet amour fou.
Oui, je te rend heureux. N’aies de crainte mon Beau Brun, c’est peut-être quand il se montre tard que le bonheur est le plus intelligent . Ce bonheur dont je te fais l’offrende aujourd’hui c’est ce qu’en font tes âpres savoirs, ta cruelle lucidité, et jusqu’à ce que tu as appris, par insigne perturbations, du ventre des femmes.
Ce bonheur qui t’arrive est un privilège et il t’arrive à temps. Plus que dans ton esprit, il prend place dans ton corps. Il y rejoint ta culture charnelle, la subversive, et l’autre, l’amoureuse. Ce bonheur est sensuel. Il se savoure, se déguste, ultime de la consommation gourmande. Il ignore la raison – ce manque d’appétit – mais non l’intuition – ce beaucoup de saveurs. Il est ce moment sans heurts, d’un voyage sans confort, en est le havre, l’accueillante couchette des siestes troubles.

Mon Amour, je pleure encore. N’en soit pas malheureux. Mes larmes ne sont plus celles de l’effroyable mais celles de l’incroyable, de l’intense. Je vivre au plus profond de mon cœur, au plus profond de ma chair devant tes aveux de fou :
« Et dire, ma Belle, que c’est grâce à toi que je peux parler ainsi, et pour la première fois, du bonheur, toi qui as su apprivoiser mes ogres jusqu’à les faire manger dans ta menotte. Comme je voudrais te garder ma petite possessive haletante, mon lierre invraisemblable, sonore et suçotant, ma jolie échevelée, ma harceleuse sacrée, ma somptueuse faille démangée de câlins, ma fouilleuse fouillée, ma mouillante, mouillée, ma fourrure fourragée, ma mousseuse bouche, mon tire-semence à tire-larigot

, mon crève verge, mon débit d’imbibé de tes babines bues, ma studieuse étudiante en lettres libertines, mon étuvée de fièvre dans mes sueurs d’étuves, toi ma chamade à cœur, toi ma tornade à pique, toi ma régnante à trèfle et moi sur le carreau, ma tendre étourdissante aux mœurs tournicotantes, ma mésangélique tombée du nid, mon amourdamoudamour, mon emmiellée de mots voulant tous dire « prends-moi », ma toute crémeuse dans mes mains, et bien d’ailleurs qu’en elles, mon adorée, mon unique, ma friponne au pinacle, ma lumière palatine, ou alors tamisée, un brin Baudelairienne, ma graine de sevené ou de je ne sais quelle plante à feuilles pubescentes, urticantes, mais lubriques, mon gala confus, ou tarabiscoté, ma porte ouverte à toutes les stupéfactions de me sentir renaître toi ma Shiva talismanique pendue à mon cou, mon pendentif suprême, pendant de tes gambettes, mon enfileuse de perles sur tes doigts en sautoir, toi mon branle-bas sans combat, toi aussi mon vin immédiat, corsé, débondé bonifié, pissant grisante poésie, Rimbaud chaptalisé d’amour, toi mon insolent redoux, ma goyave du Nord, mon muguet en hiver, ma framboise du désert, mon lexique en émoi, ma sarbacane, ma barcarolle, ma ventriloquie, ma rabibocheuse, mon embobelinante, mon ramasse-bonbons, ma barbe-à-papouilles, toi mon bonheur… »
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MessageSujet: Re: Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU )   Un de ces êtres... ( Marcel MOREAU ) EmptyDim 12 Mar - 6:25

A te lire, à me souvenir, ma gorge se noue, mes yeux se mouillent, mes jambes se serrent et se resserrent. Ton absence est si pesante, tes mots si légers malgré leur contenu poignant. Tu me parles de bonheur toi qui ignore ce que bonheur veut dire, dans le langage qui est le tien, au moment où tu m’écris et où nous guettons mutuellement sur les horloges l’accélération du temps qui nous sépare encore. Mais les mots vont plus vite que les aiguilles, ne trouves-tu pas ? Je sais tout ça, moi, et combien en amour, et en tout le reste aussi, c’est bel et bien le Verbe le maître de ta vie. J’écris, ou j’aimerai écrire dans mon autisme tout neuf, tout nouveau qu’il est né de mes récents chamboulements de vie, et il ne pourrait en être autrement depuis que tu as vu mon corps se tordre pour une phrase que je lui arrachait et qui fut si forte, sur la page – je m’en souviens – qu’à tes yeux elle en advint, noir sur blanc, orgasme de moi.
Je t’émeus, je te chambardes tant ma conscience de la puissance du verbe est de la même passion, de la même essentielle intensité que celles qui en firent dépendre ton existence, dans le passé jusqu’à aujourd’hui, peut-être, sûrement, sait-on jamais ? J’ai compris mon amour que l’écriture était de mon sang, de ma respiration et de l’obscure assainissement de mes entrailles belles. J’ai compris assez tôt qu’elle me serait intra-utérine et extra relationnelle. Compris encore, qu’en étant enragée d’elle, je me découvrirais des désirs dont je n’avais pu jusque là soupçonner l’existence, des excès en tout état de cause légitimés par le sens que je leur donnerais, ou par l’insensé auquel je n’aurais su donner un sens. Compris enfin qu’avec l’écriture j’engendrerais un monstre enviable, le mien, moi en tout et pour tout, mon être immense, révélé à lui-même, sans cesse augmenté de la singulière percée des paroles de ma nuit, nuitamment mon mystère, ma splendide nébuleuse. Ce monstre est là et tu le sens, il palpite sous ma peau, tu le vois en mon regard, entre mes gouttes d’encre. Il fait ses premiers pas de dilatateur, de multiplicateur de ma vie, de ma sensation de vivre. Il grandit mon nain hypertrophié ; je ne sais à quel point, mais il grandit.. Il grandit de chaque mot que me restituent, de gré ou de force, les voleurs de mon corps, ou ses emprisonneurs, les vieilles philosophies abstraites, les morales ennemies de la chair et autre religion du cuit contre le cru. Il grandit de chaque sonorité dont je ne confisquerai pas confisquée la tonitruante vulgarité de ce siècle à couacs et à rodomontades. Il grandit de chaque fragment de mon discours des profondeurs, et même de chaque fragment de c fragment, mis à sa vraie place, la place de ma vérité, et celle de la musique de ma vérité. Il grandit de mon art de faire chanter les cris, en dépit de leurs stridentes origines. Et les cloaques, en dépit de leur maudite origine. J’aime mon monstre, est-il désespérant, me désespérerait-il un jour au point de me jeter au plus bas de la mortelle pensée. C’est moi, lui. Mais c’est aussi moi en souveraine, dans mon royaume de folie fécondée, dite et sans fin à dire, vécue et sans fin à vivre, jusqu’à épuisement, jusqu’à l’improbable saturation du silence. J’ai compris tout cela. Alors, je suis en mesure de comprendre aussi que tu demandes aux mots ce qu’il en est du bonheur que tu éprouves à m’aimer. Les mots ne répondent pas, penses-tu ? Ils ne répondront jamais à ce genre de questions. C’est comme s’ils les éludaient, ce qui ne veut pas dire qu’ils ne les résolvent pas, à leur manière, souterraine, imprévisible. Ton aventure verbale se tait. Saches mon Amour, une chose, une seule peut-être : ton silence est mon évidence.
Ton aventure verbale qui fut cause de tant de ruptures et de désaxations, elle, experte en toutes sciences brutales, téméraires ou dérisoires, tu ne perçois pas qu’elle se prononce sur ce bonheur qui t’arrive trop tard, mais qui t’arrive à temps. C’est un monstre et sans doute est-ce le propre des monstres que de se montrer indifférent aux bonté du destin. Aujourd’hui, ton aventure verbale te fait face, telle une présence énorme et je le sens, je le ressens au plus profond de on être et de ma féminitude. Elle est compacte et ineffable, telle une sphinge mais ce n’est pas une sphinge, ça n’est pas une masse démesurée, stabilisée par le temps, et dont l’immortalité donnerait des gages à ta disposition au bonheur. Le corps verbal a tête humaine et il souffle. Il n’est pas de ton intelligence ou de ton intuition de savoir si ce qui se passe dans ses flancs est bon ou mauvais pour nous. Si tes mots à venir te préparent à de nouvelles mésalliances et autres disharmonies ou non. Tu ne le sais pas toi-même. C’est cela même qui est terrible avec la puissance du langage. Ses desseins échappent à notre entendement. Nous ne savons jamais où elle nous entraîne, si c’est au bord du gouffre recommencé, ou aux portes des derniers assouvissements possibles. Je sens bien que ton bonheur avec moi ne t’appartient pas vraiment. Il est déjà la propriété de l’écriture insatiable, monstre obsessionnel, tirant son droit à la monstruosité de l’état de dislocation dans lequel il te met. Là où il est, dans la formidable maladie d’écrire, ton bonheur est peut être agrée, ou peut-être suspecté, tu n’en sais rien encore toi-même et cela m’effraie tout comme cela me fascine. Un jour, quand je serais moi-même possédée, alors, je comprendrai. Je verrai comment, dans le secret de leur lyrisme, les mots peuvent construirent le plus haut amour. Et comment, dans le secret de leur déchaînement, ils peuvent le ruiner. Ils s’empareront de toutes mes passions, dont l’amour. Et toutes mes passions, surtout l’amour, passeront par eux. Je tremble. Je sais bien qu’on ne sort pas indemne d’une telle férocité. Mais, malgré les blessures, je crois qu’on ne peu en sortir que plus authentique, plus proche de la vertigineuse utopie d’être pleinement soi-même. On devient alors son propre gisement, retourné de fond en comble. On est sa propre genèse, de néants en naissances. Et on serait sa propre bible, si on n’était pas rongé de la certitude de la mort absolue et désespérée de n’avoir pas pu immortaliser les beautés fulgurantes, plus que les infracassables. J’imagine que vivre ainsi, c’est devenir tel que je te devine : c’est être tout de noir éclairé par des savoirs à en jouir et par d’autres, à en sombrer. Par la terrifiante allégresse des contradictions. J’aimerai que tu m’écrives un livre. Un livre de ton amour de toi, que tu sois heureux de l ‘écrire, que tu puisses prendre aux mots ce qu’ils sont capables de dire du bonheur et qu’ils ne t’avaient jamais dit. Que, pour ton être vieillissant, tu puisses leur extorquer ce fort arcane et le fixer. Que tu puisses l’attacher par l’un des ultimes maillons de la chaîne des ouvrages qui firent de toi ce que tu es. Ce maillon inattendu, que tu croyais jusqu’à aujourd’hui probablement impossible, j’aimerai le rendre tangible, qu’il descende de mon poignet de bayardère jusqu’à tes mains rustaudes, larges ouvertes. Ce serait comme un bracelet de charme et de chair, remontant à mes yeux pour s’endiamenter. Et c’est lui, distinct de tous tes fers, et incrusté d’amour que tu verrai entourer de mon corps le tien, ainsi qu’un anneau que tu voudrai garder. Tu te sens bien avec moi, et ce n’est que çà que tu appelle le bonheur, et c’est beaucoup, et c’est tout, tout ce qu’il te manquait encore d’avoir vécu et écrit.
***

Il est peut être trot tard pour que tu ailles à la découverte de la mélodie de vivre et de son trésor des mots, le voyage serait trop long et tu n’as plus de bons yeux, ni oreille à l’avenant. Il paraît pourtant que cet accord est là, pas bien loin de toi, à portée de plume, sur la trajectoire des simples ou des sages. On t’a déjà assuré que ses sonorités sont rondes m’as-tu dit un jour, et qu’elles vous liquéfient dès que vous les cueillez. Elles sentent paraît-il, la cannelle, le raisin, le fumet, et l’odeur immémoriale du bois dont on faisait des flûtes, à l’époque de Pan. Tes mots sont égorgés d’une sensualité tout autre mon Amour. Tes mots… Tes mots ont fait la guerre à l’universel mensonge et ont reçus des saintes fornicatrices leur ardente estampille, leur empreinte d’extatiques. Ils ont bandé dans l’horreur autant que dans l’adoration. Ils furent toujours tragiques, soit comme joie insoutenable, soit comme tourment primordial. Ils ont la gueule de leur histoire, à la fois fragile et forcenée, et de leur vétérance, mélancolique. Tu es, tu demeureras un piètre exemple pour tout ceux qui n’attendent du plaisir de lire que des recettes de quiétude mais quel bonheur en soit de te lire ! Je sais, au plus profond de ma chair que tu te sens bien avec moi et que tu essaies, à ta manière, de le dire du mieux que tu peux. Ton bonheur dans l’âme, ça n’est que par du bonheur d’écriture que tu as quelque chance de le traduire, non par l’écriture du bonheur.
Tu m’aimes, et quand nous sommes ensemble, quand rien ne s’oppose, entre nous, à l’expérience du ravissement partagé, quand tu es en mon mitan de toutes les succulences, tu salue, sans mots, l’instant béni de notre mélodie.
J’aimerai que tu écrives ce livre pour que le jour où nous viendra à l’un ou à l’autre le goût morbide de la décomposition, ou ne serait-ce que le sentiment poignant entre tous, qu’il est un temps pour que nous cessions de nous aimer, comme terme d’une vie où nous ne cessions d’aimer, nous puissions, toi et moi, relire ce bonheur, à défaut d’avoir su le garder.
Que ce soient les mots qui nous séparent, que ce soit la sanction d’un impossible amour, personne ne pourra douter que cette écriture dit le bonheur vivace, vivant et partant, mortel, ne dit rien d’autre que ce bonheur, même et surtout lorsqu’elle dit la peur de le perdre. Et cela ne s’oublie pas, et cela obsède, et cela fait que parfois une paupière écrase une larme imprudente. Voilà aussi pourquoi je t’aime, pourquoi tu m’aimeras encore en écrivant ce livre, plus que tu ne m’aimerais si tu ne l’écrivais pas et moins que nous nous aimerons lorsqu’il sera écrit. Je lui donnerai le visage de ma jeunesse triomphante, tandis que tu conserveras ta gueule à peine pénalisée par l’âge. Ce n’est rien, car je sais que tu as les traits de ton œuvre, façonnée à la hache plus qu’au ciseau, dans les ténèbres plus que dans la lumière, et que tu es l’élu de ma vie et non de mes rêves pour ce qu’ils ont encore de passion inachevée. Tu m’a séduite, je t’ai séduit, mais à quoi bon essayer de comprendre pourquoi ces séductions réciproques ont quelque chose à voir avec l’aimantation du langage ? N’en doutons pas toutefois : le verbe fut notre entremetteur. A nous, maintenant, d’éloigner l’entremetteur, nous de l’éliminer, à nous, peut-être, de nous mélanger à lui. Loué soit-il de nous avoir rapprochés, loué sera-t-il de nous laisser seuls avec nos corps, nos cœurs, nos humains tremblements.
Tu m’aimes, je le sais, et tu me comble; d’ailleurs, si tu ne pouvais me rendre heureuse de la même manière que je le fais avec toi, qu’adviendrait-il de notre couple ? Ton bonheur, tout comme le mien, au fond, notre bonheur, ce sont ces instants où tu m’aimes.

Ces mots ne sont pas de moi, mais j'aurais aimé les écrire. Anti
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