Plan 83
Petri a entendu les coups de feu, il monte au front.
Plan 84
Plan 85
Plan 86
Plan 87
Plan 88
Plan 89
Plan 90
Plan 91
Plan 92
Plan 93
Encore une contrainte, la mère qui devient hystérique.
Plan 93 suite
Halte une seconde. Le cinéma est un art du temps et de l’espace, ai-je eu l’occasion de dire, où en es-t-on ? Imaginons qu’il n’y ait pas eu le landau : Ness serait resté derrière la balustrade, deux camps se seraient affrontés ; Ness d’un coté et, face à lui, les gangsters. Le landau n’est pas seulement l’occasion de faire monter la tension d’un cran, en faisant que le public se dise « bon sang de bon sang ! la femme et le môme vont se retrouver au milieu du tir croisé », mais oblige Ness à sortir de son espace pour être catapulté au milieu de celui des hommes d’Al Capone. Mais, sa position est légitime, si on peut dire, il est assimilé par les gangsters à un bon père de famille et supposent qu’il s’agit d’un couple. D’ailleurs, bon père de famille, dans le sens presque péjoratif du terme, c’est ce qu’il est, Ness. Au début du film, lorsqu’il se rend le premier matin au bureau où il a té affecté, sa femme lui prépare des sandwichs et glisse dans le sac un petit mot : « je suis fière de toi. » Ness se laisse faire. A bien d’égards, le film peut être compris comme la révolte d’hommes et de femmes ordinaires contre la violence institutionnalisée de la mafia, mais nous attarder là-dessus nous mènerait trop loin.
L’économie des moyens est généralement une bonne idée au cinéma, faire d’une pierre deux coups, surtout si les coups partent en sens inverse. Ici le landau introduit d’abord une contrainte (vite ! il faut que la mère et le bébé se cassent de là), une contrainte supplémentaire en immobilisant une main alors que la fusillade vient de commencer. Mais, en même temps, il a donné l’occasion à Ness de s’incruster dans l’espace des gangsters. Et le landau n’a pas fini de faire parler de lui !
Notez encore la quantité de choses qui se passent, et le temps écoulé entre le moment où le gangster à la moustache commence à sortir sa thomson et le moment où Ness lui tire effectivement dessus Une dilatation du temps qui à froid semble exagérée mais que dans l'action permet d'étaler la tension.
Plan 95
Plan 96
Pan ! un de moins.
Plan 97
Celui qui est au milieu de l’escalier se prend deux décharges de chevrotine. Je ne suis pas expert en balistique, mais je suppose que s’il ne tombe pas, c’est dû à la distance qui le sépare de Ness. Autant dire que celui qui est en bas est hors d’atteinte.
Plan 98
Plan 99
Plan 101
Plan 101 suite
Oui , il y a Petri, alias Andy Garcia.
Plan 104
Le landau ! le landau !
Plan 106
Plan 115
Plan 116
Plan 116 suite
Plan 117
Plan 118
Plan 120
Depuis Sergio Leone – c’est une parmi plusieurs de ses contributions au cinéma moderne –, il est courant, dans ce genre de situations, de multiplier les faux raccords afin de porter la solution (qui a tiré, qui est mort) au-delà de la fin de la fusillade, ou encore pour choquer visuellement le spectateur et appuyer les impacts de balle. Brian de Palma a choisi une autre option, l’espace est restitué rigoureusement, mais pas le temps. L’ensemble des plans de cette vue (plan 120) dure une éternité. Certes, le ralenti contribue à fausser la perception du temps, mais on voit Kevin Costner en gros plan, puis le mec devant la colonne, puis Costner à nouveau, puis le mec au milieu de l’escalier, puis Costner encore, qui évalue la situation et se demande ce qu’il va faire : s’occuper de l’un, de l’autre, ou du landau. Des longueurs qui étirent la tension.
Plan 121
Plan 125 – finalement, ça sera le landau, s’ils lui laissent faire.
Plan 129
Plan 130
Plan 140
Il faut signaler que les trois tirent comme des pieds. Le mec au milieu de l’escalier, en essayant de descendre Ness, tue tous les passants et perfore à plusieurs reprises le landau. Une des balles de Ness heurte la colonne à un mètre au-dessus de la tête du gangster.
Plan 144 – Plus de munitions !
Plan 148
Plan 149 – on ne voit pas bien sur mes images : Petri lance un revolver à Ness.
Plan 153
Plan 154
Plan 156
Plan 158 – Ouf ! le môme est sauf.
Ness rassure la femme et lui dit de ne pas bouger.
Plan 167
Le gangster survivant menace de tuer le comptable, et de les priver de témoin, s’ils ne le laissent pas filer. Pour Ness, il n’en est pas question.
Plan 178 – Ness donne l’ordre de tirer.
Plan 184
Plan 187
Quelques plans plus loin, c’est le lendemain au tribunal.
Il y a deux commentaires à faire sur la scène. D’abord, ce film a déjà vingt ans (ça ne nous rajeunit pas ; c’est un des premiers films que j’ai vus après mon arrivée en France), et il est possible qu’aujourd’hui De Palma aurait choisi un montage plus nerveux ; mes ses options de base restent valables et, aujourd’hui, cette séquence est tout aussi intense qu’à la sortie du film.
Sinon, il y a un certain nombre d’invraisemblances. Le dernier gangster rate constamment Ness parce qu’à cause des deux décharges de chevrotine il ne parvient pas à lever le pistolet assez haut. Mais à la fin, il n’a aucun problème pour poser son arme sur la mâchoire du comptable. Il y a aussi qu’en analysant la scène plan par plan, je compte l’entrée de cinq gangsters, mais je n’en vois tomber que quatre. De Palma a préféré jouer l’efficacité contre la vraisemblance et il a eu raison, on n’y voit que du feu, si j’ose dire.
On retient donc que la scène repose sur deux éléments : la contrainte et la tension créé par la mère avec son landau d’une part ; le jeu dans l’espace, en plaçant Ness au cœur de l’espace des gangsters, de l’autre. Le résultat est épatant.