Sorti l'année dernière, l'ouvrage de Bernard Pivot: "
100 mots à sauver" soulève un débat d'importance: la disparition du dictionnaire des vocables précieux, soutenus, obsolètes de la langue française. Larousse et Robert, les pontes de la lexicographie, dont les pratiques d'entrée et de sortie des mots dans le dictionnaire diffèrent légèrement (contrairement à son cousin Larousse qui est un dictionnaire encyclopédique, le Petit Robert est uniquement consacré à la langue donc plus favorable à l'entrée de mots nouveaux témoignant de l'évolution de la langue) justifient ces pratiques en partie dans cet article (magasine Lire- le lien est en bas du post) ) dont voici un extrait:
Comment sauver LES MOTS par Alexie Lorca, Marie Gobin,
Lire, mars 2004 Alexie Lorca, avec la collaboration de Marie Gobin
Dessins Philippe Petit-Roulet
"Les mots s'étiolent quand ils cessent de courir sur les lèvres...quand on ne peut même plus jeter un regard sur eux parce qu'un lexicographe a décidé de les évacuer. Bon pour la casse nos vocables goûteux et colorés! Bernard Pivot part en croisade pour tenter de sauver ces mots en déclin, désignés comme vieillis dans les dictionnaires. Des extraits de son livre «100 mots à sauver» sont proposés ici, tandis que notre reporter mène l'enquête auprès des éditeurs de Larousse et du Robert. Des écrivains donnent leur avis sur les mots qu'ils jugent en péril, certains s'engagent même à en adopter. Quant au dessinateur, après avoir fait son choix parmi la liste des cent, il en offre une libre interprétation.[...]
«Peut-être, mais les mots qui sortent du Petit Robert sont conservés dans le Grand Robert», argue Marie-Hélène Drivaud, directrice éditoriale aux éditions Le Robert. Certes, mais les prix ne sont pas comparables. Le Grand Robert de la langue française en six volumes coûte 396,36 euros alors que le Petit Robert et le Petit Larousse coûtent respectivement 58 euros et 33,50 euros. Ce qui en fait les dictionnaires de référence du grand public, «nos deux dictionnaires populaires de langue», comme le souligne Bernard Pivot dans la préface de son livre.
Lorsqu'il faut trouver de la place, les idées ne manquent pas. Au Robert par exemple, on affirme exclure de préférence des «mots transparents», c'est-à-dire facilement compréhensibles par un locuteur francophone. Ainsi de «cache-corset», d'«essuie-plume» ou de «centibar» qui n'a pas résisté face à «millibar». Quant aux «motocistes» (vendeurs de motocyclettes) et aux «photostoppeurs» (photographes qui accostent le client potentiel dans les lieux publics), ils ont rejoint dans les limbes les anglicismes en vogue au début du XXe siècle, tels que «Gallup» (sondage d'opinion) ou «matcher» (disputer un match). Cet état de fait corrobore l'idée assez répandue que le lexicographe ouvre ses pages aux nouveaux venus avec trop de complaisance et d'empressement. «Autrefois, il fallait attendre cent ans pour faire entrer un mot dans le dictionnaire, ce qui était ridicule, s'amuse Claude Duneton. Maintenant c'est le contraire: il suffit qu'un mot «fasse jeune» et qu'il passe à la télé pour atterrir dans le dico!»
Comme se plait à dire l'équipe de travail du Robert: "Le Robert est un observatoire et non un conservatoire de la langue." Chez Robert, tout se joue rue de la Glacière, pas très loin de la rue de l'Observatoire...Là, des écrans d'ordinateurs, des fiches, des crayons et des milliers de livres. On y observe sous toutes ses sources (orales, écrites) lévolution de la langue. Ces différentes observations sont transmises aux lexicographes chargés d'actualiser le dictionnaire. Voici un extrait qui éclaire sur les pratiques lexicographiques de Robert dont la source se trouve dans : "Nouvelle édition du Petit Robert de la langue française":
"Le Petit Robert est un ouvrage tolérant, accueillant toutes les formes d'expressions; il s'adresse à des lecteurs adultes et responsables, leur donne les informations pouvant guider leur propre usage mais il n'offre pas la langue "politiquement correcte" dont rêvent certains, tout simplement parce qu'elle n'existe que dans leurs fantasmes. Les évolutions du vocabulaire reflètent celles de la société et des mots peuvent heurter les sensibilités (?). Laissons à chacun la liberté d'ignorer ces mots ou de les employer."
Au cas où vous auriez peur de manquer de vocabulaire, voici la liste exhaustive des dictionnaires Robert (je n'ai pas celle de Larousse sous la main):
Le Petit Robert, mis à jour chaque année, est la référence en matière de langue française depuis 1967 ; il fait l'objet d'une version cédérom, présentée en 1996 et dont une nouvelle édition très enrichie est sortie à la rentrée 2001.
Pour retrouver l'origine et la filiation complète d'un mot, c'est le Dictionnaire historique de la langue française qu'il faut consulter.
Le Robert Junior est le dictionnaire des scolaires jusqu'au collège.
Après la parution du dictionnaire le Robert pour tous, très innovant, le catalogue s'est enrichi en 1995 du Robert de poche, comportant à la fois les mots de la langue et un choix de noms propres, et en 1996, du Robert Quotidien.
En 1997, la gamme scolaire a accueilli le Robert Benjamin et le Robert
« Collège », complétant ainsi l'aide apportée à chaque étape de la scolarité.
Le Petit Robert des noms propres, mis à jour chaque année, enrichi d'un atlas géopolitique et culturel, complète le Petit Robert, en traitant des noms propres de l'histoire et de la géographie, de la littérature, de la science et des arts.
Le Robert des grands écrivains de langue française, paru en 2000, propose un panorama des « monuments » de la littérature française.
La collection des Usuels couvrent certains aspects spécifiques de la langue comme les synonymes, l'étymologie, l'orthographe, les locutions, ou encore ses aspects ludiques (mots croisés) et poétiques (un original dictionnaire des rimes)...
Magazine Lire: "adoptez un mot"
http://www.lexpress.fr/concours/100mots Je viens de prendre "
trimardeur" sous mon aile. Il n'est peut-être pas superfétatoire d'en donner le sens: à l'origine il s'agit d'un travailleur journalier, par extension "vagabond". Je lui trouve un petit charme rimbaldien "Je m'en allais les poings dans mes poches crevées..".
D'ailleurs, il est apparu à cette époque. Synonyme de chemineau, également en demande d'adoption.