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Fulmi
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 29 Sep - 14:30

Libé signale qu'on trouve sur le net le rapport 2004 du service central de la corruption, lequel aborde l'intéressante question de la corruption possible des prix littéraires.

http://www.justice.gouv.fr/publicat/scpc.htm#2004

Voici l'extrait sur les prix :

IV. - DES LETTRES OU DES CHIFFRES?
OU LES RISQUES DE CONFLITS D'INTÉRÊTS
DANS LES PRIX LITTÉRAIRES

Au commencement étaient les lettres. C'est dans ce contexte qu'Edmond
Huot de Goncourt a institué par testament la Société littéraire des Goncourt,
qui a donné naissance en 1903 au prix du même nom afin de récompenser
la qualité littéraire d'un roman publié dans l'année. Depuis cette date, les
choses ont bien changé.

Selon l'hebdomadaire Le Point (92) , « 180 titres, dont 84 nouveautés, sont
édités quotidiennement et 1231 millions de livres vendus par 300 maisons
d'édition. Le chiffre d'affaires quotidien de l'édition française est de
7,8 millions d'euros. Chaque jour sont vendus 162 838 manuels scolaires
et parascolaires, 118 715 dictionnaires et encyclopédies, 278 830 ouvrages
littéraires (dont 273 822 romans), 188 909 livres pour la jeunesse, 91
912 bandes dessinées, 29295 guides touristiques. 35 titres sont édités
en poche chaque jour, dont 17 nouveautés, 343213 livres de poche sont
produits chaque jour et 310060 sont vendus ».

Dans une livraison précédente, le même hebdomadaire (93) rapportait que
la seule annonce de la parution du sixième volume des aventures de Harry
Potter avait fait progresser de 7,5 % l'action de la maison d'édition, les cinq
premiers volumes, traduits en 60 langues, ayant été vendus à 525 millions
d'exemplaires.

Ces chiffres « donnent le tournis » et révèlent les enjeux qui caractérisent
le monde des lettres et de l'édition. Pour s'en convaincre, s'il en était besoin,
il suffit de se reporter à certains succès récents de librairie aux thèmes
douteux, exhumant les secrets d'alcôve ou les fantasmes sexuels de tel
acteur, qui ne paraissent avoir d'autre justification que les sommes d'argent
qu'ils rapportent à leurs auteurs et à leurs éditeurs. Il s'agit en l'espèce

d'entreprises beaucoup plus mercantiles que littéraires. Les exemples sont
multiples ; il n'est nul besoin de s'y attarder, d'autant que si cette littérature
existe, c'est qu'elle a une clientèle. Car c'est bien de commerce qu'il s'agit.
Certaines pratiques l'attestent, telle la publication d'un pamphlet dont
l'auteur est anonyme (94) , ce qui déchaîne les interrogations médiatiques et
offre une publicité à bon compte. On peut également citer l'exploitation
qui est faite de certains événements dramatiques de l'histoire ou d'affaires
criminelles dont les auteurs condamnés acquièrent une notoriété qui défie
parfois les règles de la morale.

La question prend une acuité particulière chaque année en septembre
au moment de ce qu'il est désormais convenu d'appeler la rentrée littéraire
avant la distribution des prix du même nom à l'automne. Car nous vivons
dans une société qui décerne des prix à défaut de ceux qui marquaient
autrefois la fin de l'année scolaire. D'ailleurs, tout le monde a son prix,
le boucher pour son boudin ou ses tripes, le vigneron, le restaurateur, le
boulanger, etc. Les gens du spectacle fêtent le retour du printemps en
multipliant les cérémonies de congratulations réciproques, pendant que de
multiples concours agricoles animent nos campagnes. Le monde littéraire
n'échappe pas à ce déchaînement de récompenses souvent décernées dans
des conditions obscures mais qui vont appâter le chaland, à tel point que
certains livres sont recouverts d'une bande rouge pour attirer l'attention et
laisser croire qu'ils ont été primés.

Notre propos n'est pas d'ajouter un pamphlet à ceux (95) qui régulièrement
viennent prendre à partie le monde de l'édition qui cherchent eux-mêmes
à devenir des succès littéraires et qui, volontairement ou non, alimentent
ainsi le système.

Notre seul but est d'attirer l'attention sur des dérives possibles compte
tenu de l'importance des sommes en jeu.

----------


92 Le Point, n° 1687 du 13 janvier 2005, « Un jour en France », p. 61.
93 Le Point, n° 1684 1685, 23 et 30 décembre 2004, rubrique «Majuscules», p. i- 77 - LE CONFLIT D'INTERETS
94 X, « Au secours ! Lionel revient ! », Éd. Privé.
95 Guy Konopnicki, Prix littéraires : la grande magouille, Jean-Claude Gawsewitch, éditeur.


.../
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 29 Sep - 14:33

Chaque année, environ 600 romans nouveaux marquent la rentrée
littéraire. Très peu d'entre eux sont élus et connaissent le succès : moins
de 20 atteindront un tirage égal ou supérieur à 50 000 exemplaires. Dès
lors, l'affirmation de Jérôme Lindon apparaît comme particulièrement
pertinente : « L'édition est le seul secteur de l'économie qui répond à une
baisse de la demande par une hausse de l'offre. » Or les maisons d'édition
ne sont pas des entreprises philanthropiques. Elles existent avant tout
pour faire des bénéfices et rapporter des dividendes à leurs actionnaires.
Elles vont donc pratiquer une sorte de mutualisation, de compensation.
Elles vont devoir récupérer sur certains succès les gains modestes ou les
sommes perdues sur d'autres, ce qui prend une importance nouvelle avec
le développement des à-valoir, c'est-à-dire des avances, généralement non
remboursables en cas d'insuccès.


C'est là que se situent les dérives possibles et qu'entrent en scène les prix
littéraires. On en dénombrerait 1150 par an, toutes catégories confondues
(près de 2 000 en comptant les distinctions et concours littéraires divers), les
prix les plus importants et les plus connus générant des tirages supérieurs à
au moins 100 000 exemplaires, quelle que soit la qualité de l'oeuvre primée,
ce qui, de l'avis des spécialistes, représente un succès de librairie et assure
des lendemains heureux à une maison d'édition.

En effet, il est difficile de faire la part des choses entre les membres
des jurys, généralement tous auteurs d'oeuvres littéraires, et les maisons
qui les éditent. Il y a là bien évidemment un risque évident de conflits
d'intérêts. Or, les conditions dans lesquelles sont recrutés, voire cooptés,
les jurés, souvent désignés à vie, sont peu claires, ce qui les rend a priori
suspectes. Certains (96) ont suggéré de renouveler chaque année les membres
des jurys, à l'exemple du Booker Prize britannique, sans pour autant faire
des propositions précises sur leur mode de désignation, ce qui a au moins
le mérite de pointer du doigt une réelle difficulté.

Quant au choix qui est effectué par les jurys, il ne manque pas de laisser
perplexe, certaines maisons d'édition paraissant monopoliser, directement
ou indirectement, les prix au détriment des autres, jamais ou rarement
récompensées, sauf peut-être épisodiquement pour détourner l'attention.
On doit également accueillir avec une certaine prudence les palmarès
ou les classements des meilleures ventes publiés par divers journaux,
généralement hebdomadaires. En effet, il paraît évident que les
classements devraient être sinon les même au moins très proches dans
chaque publication ; or on note des différences significatives qui ne
peuvent que laisser perplexe sur les conditions et les buts dans lesquels
ils ont été établis.

Cette situation pourrait se trouver aggravée par la concentration qui
s'opère dans le monde littéraire entre l'édition, la diffusion, la publicité et
la critique, la diffusion étant le stade le plus important dans la chaîne ainsi
constituée. Certaines maisons d'édition, soit directement, soit à travers le
groupe auquel elles appartiennent, assurent la distribution d'autres maisons
qui deviennent ainsi dépendantes des premières. Il y a un risque de rupture
des règles de la concurrence, les maisons ou groupes distributeurs ayant
tendance à privilégier leur propre distribution au détriment des autres. Les
récents incidents qui ont affecté une maison d'édition, « absorbée » par
une autre, viennent illustrer ces craintes.

La technique des produits dérivés, déjà analysée par le service dans
d'autres secteurs (97) , vient elle-même contaminer, selon les mêmes techniques, le
monde littéraire, notamment par l'adaptation au cinéma ou à la télévision
de certaines oeuvres avant de les vendre, autre mode de distribution, en
DVD. De même, les « transferts » d'auteurs d'une maison à une autre,
moyennant une somme d'à-valoir conséquente, et le recours au système des
agents témoignent du fait qu'écrire est devenu un véritable sport.
Enfin, la mainmise qui paraît s'opérer sur le monde littéraire par
certaines sociétés d'investissements, dont la vocation est peu littéraire, finit
de jeter la suspicion sur un système qui n'est plus que mercantile puisque
marqué par les rachats, les concentrations et la création de grands groupes
qui sont l'apanage d'autres secteurs de l'économie.
Si au commencement étaient les lettres, à la fin sont les chiffres...


---------------------------

96 Journal Marianne, livraison du 24 février au 2 mars 2003, p. 70.
97 Rapport 1996, Les produits dérivés et le marchandisage. Rapports 1993-1994 et 2003 concernant
le sport.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 1 Nov - 13:54

Goncourt forever.

Si l'on croit Éric Naulleau, patron de l'Esprit des péninsules et auteur d'Au secours Hoeullebecq revient, le Goncourt de cete année est l'objet d'une préparation méticuleuse. Fayard a besoin de rentrer dans ses sous, lui qui a investi imprudemment dans l'Houellebecq.

Libé, ce matin (c'est moi qui surligne en gras) :

La troisième et dernière sélection a pris soin d'entourer le lauréat idéal de livres peu susceptibles de lui porter ombrage.
Houellebecq, le scandale d'un Goncourt annoncé

Par Eric Naulleau éditeur et écrivain.

mardi 01 novembre 2005

Auteur de : Au secours, Houellebecq revient, (Chiflet & Co)


Quelle ultime limite faudra-t-il franchir pour que cesse enfin le scandale du Goncourt ? Un récent et sévère rapport du Service central de prévention de la corruption (SCPC), remis au ministre de la Justice, dénonçait déjà (entre autres) la confiscation des prix littéraires, et du très important chiffre d'affaires que ceux-ci génèrent, au profit de quelques grandes maisons d'édition et pointait la difficulté «de faire la part des choses entre les membres des jurys, généralement tous auteurs d'oeuvres littéraires, et les maisons qui les éditent». La plus célèbre des distinctions automnales semble à présent décidé à jeter aux orties tout souci de déontologie. Soudain l'été dernier, François Nourissier, ancien président et toujours membre influent du jury Goncourt, faisait savoir que son choix personnel se portait définitivement sur la Possibilité d'une île de Michel Houellebecq, les quelques centaines d'autres romans parus à l'occasion de la rentrée littéraire se trouvaient ainsi relégués au rang de quantité négligeable, tout juste bons à faire masse et pas même dignes d'une lecture superficielle. Sans crainte du ridicule, la deuxième liste du Goncourt intégrait pourtant in extremis un ouvrage absent de la première sélection, à savoir Trois Jours chez ma mère de François Weyergans, paru tardivement (c'est-à-dire fin septembre) chez Grasset. Jugements formés a priori et passe-droits font ici bon quoique paradoxal ménage. Afin de bien enfoncer le clou où accrocher ce triste portrait de la république des lettres, le Monde du 8 octobre dernier rapportait, sous la plume d'Ariane Chemin, que Michel Houellebecq et François Nourissier ont pris l'habitude de se retrouver à l'heure du goûter dans l'hôtel particulier du second où il arrive au premier, «trop las pour retrouver le chemin du retour», de passer la nuit sur le canapé. Touchante générosité qui consiste à offrir tout ensemble à son hôte non seulement le toit, mais aussi le couvert chez Drouant puisque le grand aîné, apprend-on dans le même article, se bat depuis cinq ans pour «le jeune écrivain» et ne souhaite rien tant que «lui offrir le prochain prix de l'académie Goncourt, le 3 novembre». Mais rien ne sert de triompher entre amis, encore faut-il y parvenir sans péril.

C'est ainsi que la troisième et dernière sélection du prix Goncourt, rendue publique le 25 octobre, a pris soin d'écarter tous les livres porteurs d'une quelconque ambition encore présents dans la deuxième sélection (Waltenberg d'Hédi Kaddour ou Lutetia de Pierre Assouline), déjà très édulcorée (où est donc le Goût des femmes laides de Richard Millet ? la Serveuse était nouvelle de Dominique Fabre ? où sont donc les Jouets vivants de Jean-Yves Cendrey ?), et de n'entourer le lauréat idéal que de livres peu susceptibles de lui porter ombrage. Falaises d'Olivier Adam se révèle un roman dépourvu d'à peu près tout ce qui caractérise la véritable littérature (style, ton, nerf, vision) et s'apparente au mieux à une rédaction de bon élève, lisse jusqu'à l'impersonnel.

Trois Jours chez ma mère de François Weyergans, sous les apparences d'une mise en abyme de l'impossibilité d'écrire, consiste en un insupportable et vain bavardage aux limites du remplissage. La bande des quatre est complétée par Fuir de Jean-Philippe Toussaint, sans doute le plus honorable texte du lot, même si son auteur pourrait concourir en bonne compagnie au titre d'écrivain français contemporain le plus surévalué. Quoi qu'il en soit, l'auteur de la Salle de bains représente la dernière chance d'éviter le scandale dans le scandale que constituerait l'obtention du prix Goncourt à la Possibilité d'une île, où notre champion hexagonal de la modernité littéraire, après avoir penché vers SAS dans son précédent opus (Plateforme), lorgne désormais du côté de la collection Harlequin («J'ai 40 ans, elle en a 20 : notre amour est-il impossible ?») et distille un ennui qui donne une idée de l'infini. Mais inutile de trop compter sur les autres distingués membres du jury pour ramener François Nourissier à la raison littéraire.

Didier Decoin, par exemple, déjà coupable de l'inexpiable forfait d'avoir proprement équarri le Comte de Monte-Cristo aux fins d'adaptation télévisée pour TF1, a fait paraître voici quelques mois un livre intitulé Avec vue sur la mer (Nil). En page 103, on y lit : «Ce système-là, prédisait M. Bonnet, finirait par nous asphyxier aussi sûrement que les émanations d'oxyde de carbone avaient eu raison de ce pauvre Marcel Proust.» Quand on confond Marcel Proust et Emile Zola, il est à craindre qu'on ne parvienne pas non plus à distinguer entre Houellebecq et la littérature.


Il va de soi que je ne suis pas d'accord avec Naulleau qui tient Houellebecq en dehors de la littérature, mais c'est sans importance.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 1 Nov - 14:01

Voici donc l'article du Monde du 8 octobre sur Houellebecq et Nourissier, mentionné par Nualleau.

Le Monde, 8 octobre.

LA DERNIÈRE PASSION DE FRANÇOIS NOURISSIER
Article paru dans l'édition du 09.10.05
Afin que Michel Houellebecq décroche le Goncourt, l'ancien président du jury est capable de tout. Pour les uns, il est le « capomafia » des prix ; pour d'autres, il reste le dernier vrai prince des lettres

Clément se plaît bien à Auteuil, dans le jardin de François Nourissier. Son maître, Michel Houellebecq, se plaît aussi, mais plutôt dans la cave à vins de l'ancien président du jury de l'académie Goncourt. Régulièrement, la petite voix timide de l'auteur des Particules élémentaires et de La Possibilité d'une île se fait entendre au bout du fil lorsqu'il est de passage à Paris. « Bonjour, c'est Michel. Est-ce que je peux venir mercredi à 17 h 15 avec Clément ? Est-ce qu'il pourra jouer dehors ? » François Nourissier ne dit jamais non.

A 17 h 14 précises, la sonnette carillonne. L'hôte vacillant de 78 ans est bousculé dans l'entrée par le corgi que Houellebecq s'est offert avec ses premiers droits d'auteur, et qui fonce en connaisseur dans le jardin. Une ombre, un double : Clément suit son maître partout, même pour les tête-à-tête télévisés.

Une fois Clément comblé, Houellebecq peut caler confortablement son spleen dans les canapés en velours de l'hôtel particulier de Nourissier. Parfois, le maître et le chien s'endorment là, trop las pour retrouver le chemin du retour. On imagine une ambiance à la Bertrand Blier, genre Tenue de soirée. Nourissier, mystérieux, préfère résumer ces rencontres d'un de ses mots d'écrivain : « Je papote, il boit, le chien court. »

Cet amour absolu entre l'animal et son maître, Nourissier connaît, et en raffole, lui qui avait écrit en 1975 pour son teckel Pilule - rebaptisé Polka par Claude Gallimard, « pour faire plus convenable » -, une impudique Lettre à mon chien. « Michel a un rapport très charmant avec Clément. Cela fait partie de notre connivence, même si la singularité du maître l'emporte de beaucoup sur celle du chien. » Une bonne raison, en tout cas, de se battre, comme il le fait « depuis cinq ans », pour le jeune écrivain. Et tenter de lui offrir le prochain prix de l'académie Goncourt, le 3 novembre.

Voilà trente-cinq ans que François Nourissier vit dans le 16 e arrondissement de Paris, et quarante qu'il habite la petite province littéraire française. L'âge, à peu de choses près, de sa longue barbe blanche, signe de ses éternels paradoxes. Elle pose le notable de la République des lettres, même si l'écrivain l'a laissée pousser pour dire sa « volonté de s'ensauvager quand même un peu ». Elle achève le portrait d'un homme de pouvoir, mais désigne aussi celui d'un siècle qui s'achève. Pour les jeunes amis de Philippe Sollers, qui se moquent volontiers de ce « fils de Paul Bourget » (le romancier conservateur de la IIIe République), elle trahit le « capomafia » - le surnom qu'ils donnent à ce faiseur et défaiseur de prix. Mais, en disant cela, ils savent bien que le nouveau monde qui se profile après Nourissier est « bien pire » que l'ancien - place forte où les agents auront remplacé les éditeurs.

« François est le dernier spécimen français des hommes de lettres de naguère. Sa première et vraie passion, ce sont les lettres, de façon envahissante, très perturbante, aveuglante presque », résume la présidente du Goncourt, Edmonde Charles-Roux, qui a succédé en 2002 à son ami à la tête de l'académie. C'est ainsi : François Nourissier est toujours aux rendez-vous de fin de mondes, au tournant des époques. Il fut d'abord proche des « hussards » (Roger Nimier, Antoine Blondin, Jacques Laurent, Michel Déon...), sans en être. Tombé dans la littérature en 1963 avec Petit bourgeois, il s'est trouvé bousculé par le « nouveau roman », avant que la « restauration » entreprise dans les années 1970 chez Grasset, sous l'égide de Jean-Claude Fasquelle et de Françoise Verny, ne le remette en selle et au centre du jeu.

On adule sa plume. Le voilà éditeur, tour à tour, pour les deux plus grandes maisons, Grasset et Gallimard, mais aussi critique littéraire prolifique, notamment au Point et au Figaro Magazine. Bon ou mauvais, avoir un « Nourissier », encore aujourd'hui, vous pose un auteur et vous lance un roman. Sans compter que les « Nourissier » restent tapés à la machine à écrire et envoyés, par fax, depuis l'hôtel particulier. Comme avant.

Maison mélancolie, dit le titre du nou-vel ouvrage autobiographique, qui vient de paraître chez Gallimard. « Le 16e arrondissement, c'est un choix de chiens. Mes chiens aimaient bien la verdure et les parcs. » Sur la terrasse, on aperçoit le jardin mitoyen des Chandernagor. Huiles, lavis et croquis : aux cimaises du salon, au-dessus des marquises et des conversations, s'est accrochée une vie. Ici, un Alechinsky, un Prassinos et « un abominable petit Picasso, dessiné au dos d'un menu de déjeuner ». Là, les drapés de châles de prière, les mains implorantes d'un couple enlacé, poussé vers les camps de l'apocalypse. Ce sont les peintures de sa femme, Cécile Muhlstein, dite « Tototte » - une Rothschild fantasque, belle et drôle, mais souvent triste. Forcément sainte, un peu, pour vivre avec cet homme qui répète sans cesse qu'il ne s'aime pas.

« Soyez l'homme d'une passion, d'un chien, d'une maison », écrit le romancier dans son dernier ouvrage. Nourissier est l'homme d'une France d'Ancien Régime, riche et bien élevée. D'une certaine droite, qui soupire devant les mauvaises manières de Nicolas Sarkozy. A Jacques Chirac, il avait écrit en 1977 une lettre de 175 pages. Aujourd'hui, il porte Dominique de Villepin aux nues. « Il fait tout beaucoup mieux que les autres. J'aime bien son comportement d'homme lige, son côté un peu féodal, cette fidélité absolue à Chirac. Et puis j'ai beaucoup d'amitié pour ce groupe de cinq humains si beaux », assure l'écrivain en évoquant la famille du chef du gouvernement. « Si on atteint mon âge sans être copain avec le premier ministre, ce n'est pas la peine d'avoir une vie sociale. D'ailleurs, vous pourriez tout aussi bien dire : «Le premier ministre a Nourissier pour ami.˜ »

Eclair fugace de vanité. La chose est rare. Même quand il reçoit, l'auteur affiche en effet le dégoût qu'il s'inspire en robe de chambre, et conserve aux pieds les pantoufles confortables de ses médiocrités bourgeoises. Quarante ans que Nourissier distille ses variations sur l'inconvénient d'être né et décompose jusqu'à l'épuisement ses succès en trompe-l'oeil. A défaut de génie, claquait l'un de ses textes autobiographiques, en 2000. Nourissier piètre sportif, amant médiocre, mauvais « coup »... « Il est l'écrivain provincial par définition, qui pousse l'analyse de la détestation de soi dans le détail », estime Philippe Sollers, chez Gallimard. « Un déprimiste, comme on le dit pour Houellebecq », préfère l'éditeur Manuel Carcassonne, que l'écrivain avait fait venir chez Grasset.

La petite musique est couverte aujourd'hui par la complainte de la maladie. Hervé Bazin, son prédécesseur à la présidence du Goncourt, avait décelé dans l'écriture de plus en plus rétrécie du romancier-choniqueur une « micrographie » - signe avant-coureur de troubles neurasthéniques. A l'hiver 1995, c'était un moniteur de ski qui observait, stupéfait, l'écrivain tomber au bas de la piste. « Une chute extravagante, dans le replat de l'arrivée, là où on a déjà enlevé ses moufles », raconte Nourissier. « Miss P. », comme l'écrivain a surnommé sa maladie de Parkinson , devenue l'héroïne de son Prince des berlingots, s'est installée dans son corps et fait trembler ses mains.

L'oeuvre s'en ressent. « Personne ne le remarque, mais je n'écris plus de la même façon. Ça ne coule pas de source, c'est désossé. » Avec l'aide de Teresa Cremisi, son éditrice passée de la direction de Gallimard à la présidence de Flammarion - où Nourissier ira sans doute bientôt, par fidélité, « planter une fleur », ses livres se font collages. Qui sait seulement comment se fabriquent aujourd'hui les Nourissier ? Qui devine que les drôles de petits chapitres de Maison mélan colie ont été assemblés comme un puzzle par les deux amis, sur la longue table baroque autrichienne du deuxième étage de l'appartement ? « Je dispose des petits morceaux de texte d'une longueur à peu près constante. Je lui fais une absolue confiance. Cel a devient pour moi le moment le plus plaisant de l'écriture », sourit l'écrivain.

Esthétique du collage, philosophie du tremblement... « Pour un homme obsédé par la rapidité, comme moi, la lenteur est insupportable. Je deviens une tour de Pise en pâté de foie. C'est une drôle d'impression. Ça devrait s'effriter, et ça mollit. » Une fois par jour, vers 19 heures, Nourissier, malade, s'abandonne à une « crise de fureur . Je me mets à hurler, je jette des objets par terre, je casse tout ».

LE 20 août, le critique littéraire a fait sa rentrée des classes. Il a laissé s'envoler de la cheminée du Figaro Magazine la petite fumée de son vote au Goncourt - avant même la liste définitive, qui compte désormais le roman de François Weyergans, Trois jours chez ma mère, chez Grasset . « J'entends un murmure impatient : et que ferez-vous le 3 novembre ?, écrivait Nourissier. Il s'agit simplement de désigner un très bon roman de l'année 2005. Eh bien, je pense que vous avez deviné mon choix », concluait-il en désignant Houellebecq.

Les collègues du Goncourt n'ont pas apprécié. Après un coup de fil à « Edmonde », sa camarade de parti, l'ancien ministre socialiste Claude Allègre a pris la plume pour sermonner l'ex-président de la vénérable académie. « Que François Nourissier aime Michel Houellebecq, c'est son droit, écrit le scientifique dans L'Express du 15 septembre. Le problème est que François Nourissier est un membre influent du jury du prix Goncourt. Et faire de la propagande pour un livre puis annoncer un vote me paraît incompatible avec l'appartenance au jury. (...) Agir ainsi, c'est mépriser les autres candidats (...), nier la dynamique d'une délibération. »

Nourissier s'en fiche. Même si le président de la République lui-même n'aime pas, il vote La Possibilité d'une île. « Non, Nourissier, non... Houellebecq, c'est un écrivain de fourré, un écrivain de buisson... », avait gourmandé le 8 novembre 2002 Jacques Chirac, convié à déjeuner par les dix écrivains de l'académie. L'auteur de Bratislava avait refusé de trinquer avec le chef de l'Etat, avant de brandir son verre à son tour : « Je vais lever mon verre à Michel Houellebecq, qui doit se sentir très seul en ce moment. »

« Cet homme-là a du pif, siffle Sollers, faussement admiratif. Il est l'ancien monde, qui ne va sombrer que très lentement. Avec Houellebecq, il dit : «Je n'ai pas perdu la main. Je reste dans le coup.˜ » Souci de modernité ? Voilà Nourissier qui en vient même à se fâcher avec Jean d'Ormesson, l'ami d'un demi-siècle. Le 27 août, dans le Fig' Mag', le critique chronique Une fête en larmes, le livre de rentrée de « Jeannot ». Nourissier parle de tout - les vacances ensemble au ski, en Corse -, mais pas de l'ouvrage. Sauf pour glisser : « Je me suis surpris, cette fois, à rêver à tes autres vies possibles, si tu n'étais pas né avec la fameuse cuillère d'argent, fortifié de courtoisie, blindé de préjugés. (...) Tu aurais été (...) un prof de rêve », conclut sa Lettre d'été à Jean d'Ormesson.

La brouille laisse les proches abasourdis. « Cela prouve que ce ferment qui oppose toujours deux hommes de lettres entre eux existe encore, veut croire Edmonde Charles-Roux. Le monde des lettres n'est pas un monde d'intrigues et de magouilles, comme on le dit. C'est un monde où on se blesse, où on se fait un mal atroce. » D'autres sont moins optimistes : « Houellebecq a surgi au moment où François arrivait au sommet de sa dépression, estime l'éditeur Gilles Cohen-Solal. Il voit en lui un nouveau Céline. Il veut le prix. »

« N'oublions pas qu'Aragon avait démissionné lorsque le jury avait refusé le Goncourt à Nourissier » , rappelle-t-on malicieusement chez Grasset, où l'on connaît la vénération de l'homme à la barbe blanche pour l'auteur du Fou d'Elsa. Que fera Nourissier si, comme souvent, le jury ne le suit pas ? « Ce n'est pas un homme à démissionner, mais il est capable de tomber de sa chaise ou de simuler une crise cardiaque pour obtenir gain de cause, comme chez Molière », sourit Jean-Marc Roberts, le patron des Editions Stock. « Semblant », seulement. Lorsque Paris Match avait proposé à Nourissier de poser pour une photo dans un cercueil, façon Volpone, l'écrivain avait trouvé la plaisanterie de très très mauvais goût. Tremblant, ralenti, « tousseur », soit. Mais muet, couché et mort, jamais.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 3 Nov - 16:15

Fin des courses, c'est Weyergans le gagnant :

"DERNIERE MINUTE 13h13 : Le prix Goncourt 2005 a été attribué à François Weyergans pour "Trois jours chez ma mère"". AFP

Piston, piston, quand tu nous tiens...
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 3 Nov - 16:19

Faudra trouver le moyen de consoler houellebecq.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 3 Nov - 16:46

alejandro a écrit:
Faudra trouver le moyen de consoler houellebecq.
Ben en attendant un autre prix, j'l'ai commandé son île, pour voir read
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyVen 4 Nov - 20:18

alejandro a écrit:
Faudra trouver le moyen de consoler houellebecq.

On peut dire par exemple, qu'il est plus intéressant, en interview, que Weyergans.

Interview paru dans Lire :

http://www.lire.fr/entretien.asp/idC=49002/idR=201/idG=3

Pour les interviews de H, j'ai un cd audio mp3 (pas l'image) de ses trois passages à la télé cet automne, si certains en veulent une copie...


Dernière édition par le Jeu 10 Nov - 18:46, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMer 9 Nov - 3:48

Et pourquoi houellebecq n'a pas gagné le goncourt puisqu'il est si bon?
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMer 9 Nov - 4:19

Saga a écrit:
Et pourquoi houellebecq n'a pas gagné le goncourt puisqu'il est si bon?

ça, Fulmi a déjà donné son explication sur la question.

Il a eu l'Interallié.
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Sainte Canaillette
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 10 Nov - 1:05

ben moi j'aime bien les railleries internes...

bon ok --------> je vais voir ailleurs si j'y suis ! Mr green
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyJeu 10 Nov - 11:07

Saga a écrit:
Et pourquoi houellebecq n'a pas gagné le goncourt puisqu'il est si bon?

Parce que. Parce que s'il avait eu le Goncourt, il n'aurait pas été si bon.

Amusante chronique d'Edouard Launet dans Libé, ce matin.

Edition. On achève bien d'imprimer
Le jury a débiléré

par Edouard LAUNET
QUOTIDIEN : jeudi 10 novembre 2005



Exceptionnellement, le jury du Goncourt a accepté cette année qu'un journaliste soit présent lors de ses ultimes délibérations. Nous sommes ainsi en mesure de révéler pourquoi Weyergans l'a emporté sur Houellebecq. Récit de ces heures haletantes, jeudi dernier.

En fin de matinée, nous arrivons chez Drouant en même temps que Bernard Pivot, le bizuth de la bande (il a été appelé à rejoindre le jury l'an dernier). Dans le petit salon du premier étage, les neuf autres jurés sont déjà assis autour de la table ronde. L'ambiance est très détendue : à l'arrivée de Pivot, François Nourissier se met à scander «Na-Nard ! Na-Nard !» en tapant du poing sur la table. Edmonde Charles-Roux se tourne vers lui : «S'il vous plaît, mon ami...», puis vers nous : «Excusez-le, c'est l'enthousiasme.» Pivot, un peu surpris de cet accueil, prend le parti d'en rire ­ c'est peut-être une tradition, après tout ­ et s'assoit à la gauche de Françoise Chandernagor. Laquelle se met immédiatement à lui parler du Massif central.

Les autres discutent des incidents de la nuit en Seine-Saint-Denis ; Michel Tournier, très renseigné, indique qu'avant d'y brûler des voitures on y enterrait les rois. Seul Daniel Boulanger reste muet : hébété, bouche entrouverte, il fixe le mur devant lui comme s'il contemplait l'archange des ténèbres. Peu après, un râle sortira de sa gorge, d'abord presque inaudible puis allant crescendo. Bien plus tard, il s'effondrera le nez dans sa soupe glacée au cresson garnie de trois queues d'écrevisses. Bernard Pivot, incapable de se détendre, trouve opportun de se lancer dans un éloge des frères Goncourt. Il est vite interrompu par Nourissier : «Na-Nard ! Na-Nard !» Edmonde : «François, reprenez-vous !» Chandernagor, à Pivot : «Mon père, qui était maçon dans la Creuse...» Didier Decoin, dans son téléphone portable : «Mais ce week-end, c'est impossible, mon chou...» Françoise Mallet-Joris éclate d'un rire hystérique. Prudemment, la serveuse qui apportait une cinquième tournée de Guignolet Kirsch décide de faire demi-tour.

Il est 12 h 55, on entend le brouhaha des journalistes qui piétinent derrière la porte. Decoin raccroche et se penche à l'oreille d'Edmonde Charles-Roux : «Alors, on dit quoi, Houellebecq ou Weyergans ?» La présidente du jury : «Mais je n'en sais rien, moi ! Voyez avec Pivot.» Pivot à Decoin : «Mais, heu... on ne vote pas ?» Decoin à Charles-Roux : «Il a dit Weyergans.» Decoin sort et déclare aux journalistes : «On a beaucoup discuté. Choisir Weyergans, c'est une manière pour nous de démontrer notre indépendance» (AFP, 13 h 45). François Nourissier fait court : «Je n'aurai pas la moindre réaction. C'est le choix de la majorité auquel je me range» (même source). Puis les portes se referment sur les jurés qui vont enfin pouvoir déjeuner. Illico Nourissier remet ça : «Na-Nard ! Na-Nard !», et cette fois tous les autres reprennent en choeur. Sauf Pivot, qui fait une drôle de tête.

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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyVen 11 Nov - 7:50

Canaillette a écrit:
ben moi j'aime bien les railleries internes...

bon ok --------> je vais voir ailleurs si j'y suis ! Mr green

Ben pourquoi ?
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyVen 11 Nov - 14:41

Capitaine Caverne a écrit:
Canaillette a écrit:
ben moi j'aime bien les railleries internes...

bon ok --------> je vais voir ailleurs si j'y suis ! Mr green

Ben pourquoi ?

Pas de trolls ici, stp.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptySam 12 Nov - 13:51

Fulmi a écrit:
Saga a écrit:
Et pourquoi houellebecq n'a pas gagné le goncourt puisqu'il est si bon?

Parce que. Parce que s'il avait eu le Goncourt, il n'aurait pas été si bon.

Amusante chronique d'Edouard Launet dans Libé, ce matin.

Autant qu'il soit permis d' en juger par cette chronique de Libé, être couronné par une pareille bande de bouffons ne doit pas, en effet, rassurer complètement le lauréat sur sa valeur littéraire. Mais les scrupules disparaissent probablement derrière le prix et les perspectives de ventes.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptySam 12 Nov - 15:14

le Veilleur a écrit:
Autant qu'il soit permis d' en juger par cette chronique de Libé, être couronné par une pareille bande de bouffons ne doit pas, en effet, rassurer complètement le lauréat sur sa valeur littéraire. Mais les scrupules disparaissent probablement derrière le prix et les perspectives de ventes.

Le Goncourt est de notoriété publique une histoire de bouffons. Je dois dire que la chronique de Launet m'a scié, quand même. Je suppose que s'il l'a publiée, c'est qu'elle est vraie : ridiculiser ainsi des personnalités aussi connues que Pivot, Nourrissier, Charles-Roux, on ne peut le faire que si l'on a en réserve du biscuit solide pour étayer son récit.

Je me demande si à l'origine de cette invitation, il n'y aurait pas Nourrissier soi-même qui, à l'âge qu'il a, ne craint plus rien ni personne et ne se serait pas amusé à jouer au tonton flingueur. Si j'avais été à sa place, j'aurais aimé organiser ce glisser sur peau de banane...

N'importe quel écrivain goncourable, est forcément, aujourd'hui, quelqu'un dans la force de l'âge et qui a perdu ses illusions. C'est aussi forcément quelqu'un qui lit et qui, donc, a une idée assez juste de sa propre valeur, commerciale ou artistique. Il compte donc sur le Goncourt pour gagner de l'argent, de la notoriété, pour se la péter grave à la télé, etc., rien de plus. Dans cette perspective, je me réjouis que le Goncourt soit allé au sympathique Weyergans (que je n'ai jamais lu) qui, ainsi, va gagner quelque argent, et tant pis pour Houellebecq, qui aurait eu ma préférence (loin devant), mais qui n'a pas besoin de vendre plus qu'il ne le fait pour vivre fort bien, et fort justement, de son art.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 22 Nov - 15:05

Puis-je me permettre de faire l'analyse d'une phrase de "Trois jours chez ma mère", le dernier Goncourt?

Page 23:

"Elle était montée vingt fois lui dire de se lever jusqu'à ce qu'elle le secoue et comprenne qu'il était mort"


Soit je n'ai rien compris de la grammaire française, soit cette phrase est fausse. Pourquoi?

"Elle était montée" est un plus-que-parfait, un mode du verbe qui désigne une action se déroulant précédemment à une autre action. Admettons l'usage de ce temps pour l'instant...

Mais pourquoi dans ce cas la suite de la phrase est-elle au présent: "elle le secoue et comprenne"??? Au subjonctif du présent pour être précis.

Il me semblerait plus juste d'écrire:

"Elle était montée vingt fois lui dire de se lever jusqu'à ce qu'elle l'eût secoué et eût compris qu'il était mort"


Mais on pourrait encore se demander ce qui justifie l'utilisation du plus-que-parfait? Le contexte, si l'on relit le chapitre, ne le permet pas...

Le paragraphe originel est le suivant:

"Dans cette maison, un jour d'hiver, mon père qui devait travailler toute la nuit avait demandé à ma mère de le réveiller impérativement avant midi. Elle était montée vingt fois lui dire de se lever jusqu'à ce qu'elle le secoue et comprenne qu'il était mort"


Selon moi il faudrait écrire:

"Dans cette maison, un jour d'hiver, mon père qui devait travailler toute la nuit avait demandé à ma mère de le réveiller impérativement avant midi. Elle monta vingt fois lui dire de se lever jusqu'à ce qu'elle le secouât et comprît qu'il était mort"


ou encore:

"Dans cette maison, un jour d'hiver, mon père qui devait travailler toute la nuit avait demandé à ma mère de le réveiller impérativement avant midi. Elle monta vingt fois lui dire de se lever, puis elle le secoua et comprit qu'il était mort"


Sur une échelle de temps:

il demande de le réveiller --> puis travaille la nuit --> ensuite la mère monte --> elle le secoue --> puis découvre qu'il est mort.

Pqp --> passé (imparfait) --> passé simple --> passé simple

alors que dans le texte de l'auteur on avait:

pqp --> passé --> pqp --> présent.


Ben oui Monsieur Weyergans, retournez-y, chez maman, si elle vous manque tant...
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 22 Nov - 21:22

@mmm

Bien vu. Ah, les Goncourt!...
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 22 Nov - 21:29

ben dis donc, j'espère que l'reste est mieux torché
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 22 Nov - 21:37

Ben... a mon humble avis non. Même un peu difficile à comprendre, tant l'auteur saute du coq à l'âne, avec en plus une gestion des temps laborieuse. Dur dur...
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 EmptyMar 22 Nov - 23:54

mmmm a écrit:
Selon moi il faudrait écrire:

"Dans cette maison, un jour d'hiver, mon père qui devait travailler toute la nuit avait demandé à ma mère de le réveiller impérativement avant midi. Elle monta vingt fois lui dire de se lever jusqu'à ce qu'elle le secouât et comprît qu'il était mort"

C'est aussi mon avis (ce que j'ai eu décidé avant d'avoir lu toutes tes propositions Mr green ). C'est le plus simple et le plus classe.
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MessageSujet: Re: Prix : Qui gagne quoi ?   Prix : Qui gagne quoi ? - Page 2 Empty

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