J'ai volé ceci au forum fr.lettres.langue.francaise :
Jean (Rampal)
12 mai 10:04
Groupes de discussion : fr.lettres.langue.francaise
De : "Jean \(Rampal\)" <irèn...@hotmail.com> -
Date : Thu, 12 May 2005 10:04:23 +0200
Local : Jeu 12 mai 2005 10:04
Objet : Pourquoi veulent-ils tuer le français ?
Pourquoi veulent-ils tuer le français ? Bernard Lecherbonnier
Albin Michel, mars 2005, 256 pages.
[Quatrième de couverture] :
"Les fonctionnaires pour faire carrière, les hommes d'affaires pour gagner
de l'argent, les chercheurs pour gommer leur nationalité, les politiciens
par soumission aux prétendues lois du marché.
Conspiration hétéroclite, cinquième colonne composée de pédagogues
libertaires qui ont programmé le massacre de la grammaire et de la
littérature dans l'enseignement, d'ultralibéraux prêts à sacrifier vingt
siècles de civilisation sur l'autel du profit immédiat, de régionalistes qui
instrumentalisent la question de la langue pour disloquer l'unité nationale,
de fédéralistes rêvant d'unifier l'Europe autour du seul anglais.
Le responsable d'un tel gâchis ? Le pouvoir politique qui, depuis 1995, a
sacrifié la politique de la langue nationale, patiemment édifiée par ses
prédécesseurs, aux impératifs économiques, aux injonctions bruxelloises, aux
provocations séparatistes.
Les solutions ? Elles existent : il suffit d'appliquer la loi
constitutionnelle en France et les conventions internationales hors de
France. Mais y a-t-il encore un pilote dans l'avion ?
Bernard Lecherbonnier, professeur à l'université de Paris-XIII, directeur de
recherches en études littéraires francophones, brosse un tableau alarmant de
la situation avec ce plaidoyer en faveur d'une défense active de la langue
française, « langue de la République » selon l'article 2 de la Constitution.
Compte rendu de lecture de Jean-Paul Brighelli sur le site de SLL :
Essentiellement un travail de linguiste, spécialiste de la langue, qui
s'insurge contre l'américanisation du français, et la "trahison des clercs"
(enseignement de l'anglais en primire, etc.) sans compter celle des "élites"
(grandes entreprises françaises imposant l'anglais). Il commence là où
Etiemble avait terminé son Parlez-vous franglais ? : constat d'un
quasi-complot visant à faire perdre toute notion de culture, au profit d'une
disponibilité économique.
Au niveau des responsabilités, Bernard Lecherbonnier constate une connivence
de fait entre le courant libertaire issu d'une mauvaise lecture de 68 et
l'ultra-libéralisme - le second seul ayant pleinement conscience de ce qu'il
fait, les autres, pédagogues et didacticiens des IUFM en tête, étant
constitué de pauvres cloches qui ont peu à peu saisi tous les rouages de
l'Education : violentes attaques contre les IUFM, et encensement de Sauver
les lettres.
Attaques tous azimuts contre Ferry et Viala (très féroce), Allègre,
Kouchner, mais aussi bien Martin Bouygues, Alain Minc, Louis Schweitzer
Serge Tchuruk, Pascal Lamy (remarques incisives sur la perte du français au
sein des instances européennes et internationales)...
Idée générale : les ministres et responsables qui font la promotion de
l'anglais sont en fait, à droite comme à gauche, des atlantistes plus ou
moins déclarés qui ont fait du modèle américain leur cheval de bataille. En
pratique, généralisation des méthodes de lecture globale et semi-globale
pour anéantir l'esprit même du français : fabrication volontaire d'un
handicap permanent. Bernard Lecherbonnier s'élève contre l'apprentissage de
l'anglais en primaire, arguant du fait qu'on ne doit pas apprendre une
seconde langue tant que la langue maternelle n'est pas fixée.
Bonne page [après un résumé des travaux et conclusions de la Commission
Viala] :
"L'objectif d'Alain Viala est clair : émasculer la littérature, en faire une
catégorie de la communication, supprimer toute référence à la notion de
style, évacuer toute idée d'esthétique. Aucun régime totalitaire n'a eu
l'audace de pousser la censure jusqu'à cette limite." (suite pp. 64-65) Idée
au passage que seuls quelques lycées de centre ville et quelques grandes
boîtes privées échappent au désastre, avec la complicité des divers acteurs
(institutions, inspection, etc.) de façon à préserver les héritiers des
privilégiés. Education à deux vitesses, création d'une main d'oeuvre
acculturée, etc.
Dénonciation de la politique ministérielle qui va dans le sens du désastre
dans le seul souci d'économiser des heures d'enseignement.
Responsabilité des instituts de recherche scientifique, qui ont accepté
l'idée que l'anglais était la langue de la science, et des acteurs
économiques majeurs, persuadés itou que c'était la langue des affaires.
Chapitre plus contestable (il m'a confié que celui-là avait été très mal
perçu et compris) sur les langues régionales : notre ami est un jacobin pur
et dur. Chapitre ("L'Ere de l'autruche") sur les diverses politiques
officielles menées depuis, en gros, la Libération. Et fin sur le "black
french" (ce devait être le titre général, mais Albin Michel a calé dessus) :
responsabilité de Jospin dans la déroute du français, créolisation de la
langue sur le territoire national même. Bernard Lecherbonnier évite de
s'assimiler aux puristes, mais prend parti pour une langue et une culture
vivantes, qui devrait s'appuyer sur une étude sérieuse de la langue et de la
culture passées. Considérations au passage sur le rayonnement de la langue
française hier et aujourd'hui. Finit en affirmant que le problème est
politique, et que sa résolution viendra d'une réorientation politique - à
condition que les médias, qui jouent la collaboration atlantiste, en mettent
un coup.
www.sauv.net