http://img122.exs.cx/img122/5076/bauer.jpgNom : Bauer
Prénom : Charlie
Date de naissance : dans les années cinquante
Signes particuliers : Rebelle, lettré
- Né à Marseille, quartier chaud (entendre par là quartier à population cosmopolite et pauvre. Par extension : zone marquée par une délinquance grave, précoce et quasi irréversible )
- Adepte de la religion populaire de l’époque, dans son quartier : communiste
- 24 ans de prison pour contestation, insoumission et rébellion aggravées au règlement interne
- 14 tentatives d’évasion
- 14 transferts dans les prisons françaises
- 9 années en cahot ou en QHS
- Partisan de la légalisation du cannabis et fumeur de cannabis
- Ami et compagnon d’armes de l’Ennemi public n°1, Jacques Mesrine et surnommé son « Lieutenant » ; activistes contre les QHS
- Torturé à l’électricité, battu à mort, a manqué périr noyé de façon volontaire et organisée par ses geôliers
- Licencié Es Philosophie et Es Sociologie
- Marié à Renée, professeur de littérature, un enfant
- Libéré en 1988, intact.
Voici, en quelques lignes, le profil de l'auteur de "
Fractures d'une vie ». Charlie Bauer livre le récit d'un monde à part : la prison et son expérience carcérale, longue d'un quart de siècle, constitue un témoignage effarant et unique.
Effarant parce qu’il évoque, crûment, ce qui était encore une réalité il y 20 ans : les QHS (Quartier de Haute Sécurité) et qu’on a abrogé dans les années 80 ; unique parce que tout homme en survie aussi longtemps développe une acuité de l’existence et de son être à nul autre pareille.
La prison est le lieu du non-droit, de la déshumanisation, de la perte d’identité et de la frustration de tous les désirs :
« La prison, c'est l’Anti-vie. […] Il suffit de si peu, d’un temps et d’un espace aux dimensions ridicules pour franchir les portes d’un univers dont la différence est aussi marquée que celle de la vie à la mort. Aucune comparaison ne peut être admise entre ces deux univers contradictoires. Oui, c’est cela, une contradiction dont la référence est ces deux identités contraires que sont le noir et le blanc. »Donc, Intra-muros, Charlie Bauer revendique, résiste et se bat ; c’est le récit de toute sa lutte qui fournit matière au texte. Revendiquer ses droits en tant que détenu, tenter de s’évader à tout prix pour échapper au système anéantissant du monde pénitentiaire, apprendre, s’instruire, aimer, des armes pour résister, combattre l’asservissement, préserver son identité et sa dignité.
Dans un monde manichéen par excellence, Charlie Bauer inverse implacablement les rôles et c’est par le biais d’une analyse tranchante des rapports humains qu’il façonne l’image des gardiens de prison.
Quelle bestialité, quelle animalité sous-tend le sadisme des geôliers ? Vu comme des animaux sauvages, livrés aux pulsions sadiques qu’offre un rapport de domination légitimé par une administration toute puissante. Et quelle bêtise aussi anime ces décervelés fonctionnaires, lobotomisés de toute psychologie…
Autre citation marquante :
« Il faut les voir dans leurs œuvres, pratiquer la surenchère à qui sera le plus crapule parmi les crapules ! Des pauvres types en somme, que le chômage jette sur le marché des demandeurs d’emploi mais les pauvres types ont tôt fait de devenir des « sales types » dans les espaces de pouvoir qu’on leur autorise. Sur le matériel humain, les détenus qui leur sont confiés, s’exercent des débordements, des excès… ».Préserver sa dignité et sa part de liberté, c'est aussi résister à l’écrasement d’un système répressif visant à annihiler. Ainsi l’homme en prison n’existe plus que par sa capacité à lutter .
Pour Charlie Bauer, libéré, l'écriture devient le moyen de figer et d’évacuer à la fois un temps accompli, révolu ; car c'est bien de temps dont il s’agit (24 années de prison), un temps
« hors de la norme universellement admise », rythmé par le cliquetis des clés qui forcent les serrures, par la successive réalité diurne qui exacerbe la perception de l'obscurité, de la solitude, de l'éternité. Jeu de mots avec le titre peut-être ? Un temps que l’on additionne jusqu'au paiement total de la facture., un temps comme une fracture, suspendu dans l’existence, en-dehors de la normalité .
«
Fractures d'une vie » est un récit de violence et de dénonciation mais qui porte haut les valeurs de Charlie Bauer, érigées en tant que philosophie de vie et qui ont constitué le seul moyen de moyen de sauvegarder l’identité d’un bandit national.
La prison cependant, demeure inséminée et le mot n’est pas faible, fait partie intégrante de la mémoire, préside à tous les souvenirs du passé mais un passé qui s'émancipe, à sa manière, face à la force d’écriture, devient une force motrice, une dynamique pour savourer le temps à venir : " Je sais que l'on ne sort jamais de la prison après y avoir tant vécu. On sort avec la prison. aujourd'hui elle est les armes et clefs de ce savoir et j'ai tant besoin d’apprendre encore,. »
Autre remarque :
Fractures d’une vie est reparu avec une postface : «
Quinze après »
http://atheles.org/agone/fracturesdunevie et une autre couverture :
http://www.atheles.org/couverture/couv_582.jpg" border="0" alt=""/>
Et un dernier extrait qui s’adresse directement aux lecteurs du livre, une sorte de préambule avant la lecture :
« Qu’est-il de plus important, être ou avoir ? Chacun, de tout temps, essaie de concilier ces deux modes d’existence et de les conjuguer comme il peut. Qui n’a jamais menti, volé, éprouvé quelque colère ou révolte, enfreint le code (qu’il soit de la route ou pénal) ou au moins rêvé, imaginé, désiré le faire ? Celui qui ne se reconnaîtrait pas dans ces ardeurs, ces passions, ces hauteurs et ces bassesses, ces raisons et ces torts serait un saint ou un fourbe, ce qui est d’égale valeur ; et ce récit, ces mots ne peuvent l’intéresser. Je parle au genre humain et non au surnaturel. Ce genre qui fait les individus pétris de fautes, d’erreurs. De ces êtres si beaux et si vils dans leurs imperfections qu’ils traduisent la preuve de leur perfectibilité. »