Vu encore en avant-première,
« Le Temps Qui Reste »
Scénario, dialogue, réalisation: François Ozon
Sortie: 30 Novembre 2005 -I
nterprétation: Melvil Poupaud, Jeanne Moreau, Valeria Bruni-Tedeschi, Daniel Duval, Marie Rivière, Christian Sengewald, Louise-Anne Hippeau...
Présenté dans la Sélection Un Certain Regard (Cannes 2005), ce film met en scène les derniers mois à vivre de Romain, un photographe âgé de 30 ans, atteint d'un cancer incurable. A l'origine de ce projet, il y a l'idée d'une trilogie sur le deuil, commencée avec le drame « Sous le Sable » qui abordait cette question : comment vivre la mort de l'autre ? « Le Temps qui Reste » pose celle de sa propre mort à soi. "Et le troisième volet, que je ferai peut-être un jour, racontera la mort d'un enfant", ajoute le cinéaste.
Synopsis : Romain Melvil Poupaud) est un jeune photographe de mode, égocentrique, capricieux, arrogant. Tout semble lui avoir réussi : sa profession, un joli appartement à Paris et un petit ami ravissant et sympathique. A 30 ans, il apprend brutalement (quand il s'évanouit au cours d'un reportage photographique et est examiné à l'hôpital, qu’il a une tumeur et n'a plus que quelques mois à vivre. Il est atteint d »un cancer incurable. C’est ce « temps qui reste » que filme François Ozon. Le film nous propose de vivre les derniers mois de sa vie, qu'il choisit de passer seul, sans se faire soigner, loin de ses proches.« Il fait le choix d'accepter sa solitude et de ne rendre des comptes qu'à lui-même." dit le réalisateur.
Romain, en effet, ne raconte rien de sa maladie à sa famille et son ami. Sa grand’mère (Jeanne Moreau) est la seule personne à laquelle il se confie… parce qu’une affection toute particulière les lie et… « parce que tu te trouves aussi près de la mort que moi » lui dit-il.
Sur l’autoroute qui le ramène à Paris à Paris, il accepte une offre inattendue d’une serveuse dans un restoroute( Valeria Bruni-Tedeschi)…ce qui l’aide peut-être à accepter sa mort...
Tout le film est intense, sec, presque sans larmes. Un film assez doux…
Melvil Poupaud, son interprète, n’est pas que le joli jeune homme qu’on connaissait dans les films de Rohmer… Plus adulte, il révèle une sensibilité et une vulnérabilité surprenantes (et je le trouve toujours aussi beau..plus même !).
« Dans mon film,
dit François Ozon, je ne tenais pas à présenter un personnage qui fait des choses extraordinaires. Je voulais davantage montrer la réalité concrète de la situation : comment vit-on quand on sait que l'on va mourir ? Quelles sensations traverse-t-on, quelles décisions prend-on ?... . L'enjeu pour lui n'est pas tant de se réconcilier avec les autres qu'avec lui-même. D'une manière générale, Romain se libère du rapport à l'autre. Il fait le choix d'accepter sa solitude et de ne rendre des comptes qu'à lui-même… Je voulais qu'à la fin Romain tombe dans un anonymat total. Quand il se retrouve sur cette plage au milieu des corps plein de vie et de joie des vacanciers, cela produit un contraste visuel, auquel je tenais particulièrement. Je me suis souvent demandé face aux gens allongés sur les plages : «Tiens, s'il y en avait un qui ne se relevait pas ? S'il ne dormait pas, s'il ne se faisait pas bronzer, mais s'il était mort...?» C'est l'une des images que j'avais en tête avant d'écrire : ce corps seul le soir, alors que tout le monde est rentré chez soi et que la marrée monte. Quelqu'un qu'on oublie sur la plage. Je pourrais presque dire que c'est pour ce plan-là que j'ai eu envie de faire le film. Je ne savais pas exactement ce que cela signifiait, je savais juste que cela renverrait à une acceptation des choses. Romain ne crée pas de mise en scène autour de sa mort, il s'abandonne.
Melvil Poupaud confie :« Je me suis préparé en amont. François voulait que je sois plus musclé que je ne l'étais pour le début du tournage. Il savait que ce qu'il me demanderait physiquement allait me maintenir dans le rôle. J'ai travaillé avec un coach. Pendant trois mois, j'ai fait de la gym tous les jours. Ça met dans une disposition et une concentration qui permet de mieux entrer dans le rôle. Grossir avant le tournage me permettait aussi de perdre plus vite du poids pendant le film. Et le fait d'être affamé à cause d'un régime draconien met de drôles de trucs dans la tête. On devient monomaniaque sur la bouffe et ça entraîne un rapport bizarre au monde. Sur le tournage, je ne pouvais pratiquement rien manger. Je n'allais donc pas déjeuner avec le reste de l'équipe et cet isolement me rapprochait encore plus du rôle. »
François Ozon est une énigme… Réalisateur prolifique de films qui se suivent mais ne se ressemblent jamais. Ce film, personnel et douloureux, parle une nouvelle fois pourtant du sexe et de la mort, deux thèmes fondamentalement liés chez lui.
De très belles scènes :
-La rencontre de Romain avec sa grand’mère bien sûr.
- la rencontre avec le personnage de Valérie Bruni-Tedeschi.
- la scène très émouvante où son père(Daniel Duval) le raccompagne en voiture. Un Daniel Duval métamorphosé en père bourgeois dont le regard et le visage marqué traduisent en finesse une grande émotion. Une scène masculine très tendre. Une de mes préférées dans ce film.