On est toujours de quelque part.
J’ai enfoncé mes doigts dans les ténèbres. Sourde opacité à mouvance fluide. Tout bouge tout le temps. Tout se fait, tout se défait. Plus rien n’est plus jamais pareil.
Le sable s’échappe d’entre mes doigts. Que peut-on contre l’évasion de cet instant. Il n’existe déjà plus.
Je voudrais savoir. Je voudrais comprendre.
Réminiscences-puzzle à frôlements de chair. Je suis de ces fruits de printemps aux saveurs d’un été immobile. L’arbre s’est trompé de fleurs. Je demeure insoumise.
Les racines de mon arbre s’élèvent jusqu’au ciel et se perdent derrière la nuit. Je suis de ces étoiles rousses aux senteurs fraîches d’une aube ensommeillée. Là-haut, tout est si loin.
Je suis océane, remous, marées, déferlantes à naufrager les marins, rugissante, fière, sournoise, sirène à chants de couchers. Je suis sel de miel.
J’ai vainement cherché la pointe-noyau, le centre, le verbe, la raison.
Dans le creux de ma paume, quelque poussière de sable noircit la ligne de vie. Est-ce lui, est-ce toi, est-ce un autre, demain ?
Nos pas n’ont pas laissé de traces sur le sable.
Serre-moi fort. Ne dis rien.
Aime-moi.
Je danserai pour toi la noyade des orphelins.
Clair Obscur - Mars 2005